Les vins de Saint-Pourçain sont souvent qualifiés de « vins de soif ». Mais que signifie cette expression populaire ? Dire que c’est un vin qui désaltère comme l’eau ne suffit pas. « C’est une bouteille qu’on peut ouvrir à deux et qu’on est sûr de finir dans la soirée ! » Pour Morgan Hubert, responsable des achats vins chez E.Leclerc, grande enseigne de distribution française, la définition est évidente. Il peut même le décrire en détail : un vin digeste avec une bonne acidité, sans notes boisées du fût, sans arômes de vieillissement ou de maturation, mais avec des notes fruitées intenses issues de la fermentation du raisin.
Il cite les cépages phares des vins de soif : le chenin pour les blancs, le cinsault ou le gamay pour les rouges, voire le pinot noir s’il n’est pas boisé. Et son préféré, le pineau d’Aunis, un cépage cultivé dans le Val de Loire, principalement pour les coteaux-du-vendômois, capable de créer “des vins dynamiques qui dansent dans le verre”. Autrement dit, des raisins qui produisent des vins légers en alcool et en structure, avec peu de tannins. Autrefois, on parlait de “gouleyant”.
Tout le monde n’est pas à l’aise pour parler des vins dits « désaltérants ». Par peur de s’attirer les foudres des ligues anti-alcool ; par peur surtout de donner une impression négative de ces vins qu’on boit mais qu’on ne goûte pas. La plupart des cavistes préfèrent l’expression « vin de plaisir » ou « vin de copains ». Ce n’est pas plus clair pour le consommateur, qui rencontre rarement des vins qui ne sont pas destinés au plaisir ou à être servis à des ennemis.
Simple et fruité
Deux indices permettent de mieux comprendre le concept. Qu’il soit rouge, blanc ou, plus souvent, rosé, le vin de soif se sert de préférence à l’apéritif. Contrairement au vin « gastronomique », dont la complexité, la structure et l’élégance se savourent de préférence à table, ce vin ne nécessite pas de repas. Pour souligner son caractère simple et fruité, il peut même être servi à une température légèrement plus fraîche.
Le deuxième indice est le prix. Le désaltérant n’a pas besoin d’être conservé longtemps, ni d’un gros investissement pour le créer, ce qui le rend plus accessible en termes de prix. “On peut trouver des bouteilles de grande qualité entre 7 et 12 €”, explique Laurent Janiaud, de la Cave des Champs, à Saint-Brieuc, qui propose un Côtes-Catalanes 2022 à 9 €.
Frais et léger, le vin de soif est considéré comme réservé aux régions viticoles tempérées. Pourtant, on le trouve partout. Au domaine Les Marmandais, à Cocumont (Lot-et-Garonne), on le produit depuis 10 ans. « Les raisins sont cueillis un peu plus tôt dans l’année, pour préserver l’acidité, et récoltés avant le lever du soleil, explique le directeur Frédéric Costella. Ils sont ensuite vinifiés à basse température, pour éviter d’extraire les tannins. Puis la cuvaison est très courte, pour limiter la concentration. Le jus est écoulé rapidement, pour le séparer du marc, ce qui lui donne de la puissance. Et il n’est pas assemblé avec du jus de presse, ce qui aurait le même effet. Ces procédés rompent avec les schémas traditionnels. Mais il faut oser ! »
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