CContrairement aux autres hommes jugés depuis le 2 septembre devant le tribunal correctionnel d’Avignon, il est le seul à ne pas être inculpé du viol de Gisèle Pelicot, la désormais ex-femme du principal accusé, à leur domicile conjugal de Mazan (Vaucluse).
Mais comme la plupart de ces hommes, âgés de 26 à 74 ans, il est poursuivi pour viol aggravé et risque également jusqu’à 20 ans de prison.
Manipulé par Pelicot ?
Enhardi, voire manipulé, par Dominique Pelicot, de huit ans son aînée, il avait calqué son protocole, mais sur sa compagne. Il l’avait droguée avec le même anxiolytique, fourni par celle qu’il avait rencontrée sur le site Coco.fr et qui se présentait sous les avatars de « dompteur » ou de « pervers ». Puis il l’avait violée et l’avait fait violer par lui.
Tout cela en photographiant ses actes, toujours comme le faisait Dominique Pelicot, qui conservait méticuleusement les souvenirs des agressions sexuelles sur sa femme.
Au moins douze faits de viols ont été recensés par les enquêteurs sur la compagne de “Rasmus”, “Pierre” ou “Kim”, les pseudonymes qu’il utilisait sur Coco.fr, dont dix auxquels M. Pelicot a participé, entre 2015 et 2020, à leur domicile dans la Drôme, à une cinquantaine de kilomètres de Mazan.
Seule différence avec Dominique Pelicot, celui qu’un des coaccusés décrit comme “le chef d’orchestre” des viols de Mazan : il ne semble pas avoir recruté d’autre homme sur internet.
“Je reconnais les faits”, avait sobrement déclaré à l’ouverture du procès Jean-Pierre M., l’un des 18 accusés détenus (32 autres comparaissent libres, le 51e est en fuite, NDLR).
“Je ne lui pardonnerai jamais”
Celle qui est toujours son épouse, Cilia M., a livré mercredi un témoignage émouvant au tribunal, se disant « dévastée » par la révélation des faits à l’hiver 2021 et affirmant qu’elle ne lui « pardonnerait jamais ».
« C’est inconcevable qu’il ait fait ça. C’était une personne formidable. Il nous a détruits. J’attends la vérité, qu’il dise pourquoi il s’est lancé là-dedans. Pourquoi il a fait ça. On s’entendait bien. Il n’y a pas eu de dispute. Il n’y a rien eu. C’est incompréhensible », explique cette femme menue qui, par affection ou même « pitié » pour son mari, n’a pas porté plainte au civil.
« Je veux protéger mes enfants autant que possible. Ils ont traversé suffisamment de choses. Et ils aiment leur père. C’était une personne gentille et merveilleuse. Et bien sûr, je ne peux pas tout oublier. C’est le père de mes cinq enfants. Je n’avais jamais eu à parler de mon mari avant cela », a-t-elle déclaré, en larmes.
L’interrogatoire de Jean-Pierre M., prévu jeudi, pourrait ne pas avoir lieu en raison de l’absence médicale de Dominique Pelicot, qui reviendrait au mieux lundi.
Même mode de fonctionnement
Lors des événements, la conjointe de Jean-Pierre M. s’est réveillée à plusieurs reprises parce que son mari lui avait administré une dose trop faible de médicament anxiolytique, craignant pour sa santé.
“Je me suis réveillée en sursaut, j’ai vu un homme debout contre la fenêtre, avec une lumière clignotante et mon mari à côté de moi. Je n’ai pas eu le temps de me lever avant que l’homme ne soit sorti. J’ai couru après lui, j’ai demandé à mon mari ce qui se passait. Il a dit que c’était pour voir mes sous-vêtements et puis il s’est fait prendre dans ses mensonges (…) J’étais habillée, il n’y avait aucune indication de ce qui s’était passé”, a-t-elle expliqué mercredi.
Sans pathologie grave, Jean-Pierre M. aurait réalisé ses fantasmes d’échangisme et de candaulisme (être excité en voyant son partenaire avoir des relations sexuelles avec d’autres, NDLR) “grâce à la rencontre avec Pelicot”, a précisé mercredi un expert psychiatre.
Interrogé pour savoir si son père avait été manipulé, son fils a déclaré mercredi qu’il en était “certain” : “J’ai la conviction profonde que s’il n’avait pas rencontré cette personne, cela ne serait jamais arrivé”.
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