Langis Michaud est professeur titulaire à l’école d’optométrie de l’Université de Montréal. Il a une expertise en santé oculaire et en ce qui concerne l’utilisation de lentilles cornéennes spécialisées.
La myopie est un trouble de la vision qui affecte environ 30% de la population mondiale. Et cette proportion continue d’augmenter. À tel point qu’il est estimé qu’en 2050, il atteindra 50%.
Pour plus récemment, la National Academy of Sciences, une importante organisation publique aux États-Unis, n’a pas qualifié la myopie non comme un simple problème de vue, mais en fait comme une maladie. Ce changement de paradigme considère le potentiel de la forte myopie pour provoquer des changements pathologiques importants.
En tant qu’optométriste, cette nouvelle classification m’appelle directement, car elle modifie le modèle de soins pour les patients souffrant de myopie.
Mais qu’est-ce que cela implique pour les agences de santé publique et nos gouvernements?
Quand la myopie rime avec des pathologies
Le lien entre la myopie et la pathologie avait déjà poussé l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à définir la myopie, en 2019, comme un facteur de risque important de cécité évitable ainsi. Cette décision était basée sur les travaux du DR Flitcroft, ophtalmologiste irlandais et consensus international d’experts.
Le DR Flitcroft a montré que toute personne myope est à risque de pathologie oculaire et que ce risque augmente proportionnellement au degré de myopie.
Vous devez comprendre qu’un œil myope est un œil qui s’allonge et s’étend au-delà de sa longueur moyenne de 24 mm. Cette caractéristique implique une menace pour sa structure, y compris la rétine. Sous l’effet de cet allongement, la rétine et la structure oculaire peuvent subir une rupture et des larmes.
Le glaucome et les cataractes peuvent également se produire plus rapidement, et leur association avec une myopie forte rend leur traitement beaucoup plus complexe.
La principale pathologie qui peut conduire à la cécité chez les personnes myopes est la maculopathie (MM), qui peut particulièrement se développer lorsque la longueur axiale de l’œil dépasse 26 mm.
Cette implication est caractérisée par des fissures de macula, la partie centrale de la rétine qui assure la vision la plus précise et qui contient nos meilleures cellules (photorécepteurs). Ces fissures réduisent l’acuité visuelle irréparable. La cécité légale peut se produire lorsque les vaisseaux sanguins et les hémorragies compliquent le scénario, un peu comme la dégénérescence maculaire humide.
Myopie, un problème de santé publique
Heureusement, il existe des verres optiques (lunettes ou objectifs spécifiques, avec des profils optiques provoquant un défocalisation à la périphérie) et pharmacologique (atropine à faible dose) pour ralentir la progression de la myopie.
Il est en effet possible de ralentir ou de moduler l’allongement et l’étirement de la rétine, et ainsi de réduire le risque de MM et de pénalisation des dommages visuels. C’est là que le terme «cécité évitable» suit, utilisé par l’OMS.
Chaque degré de myopie sauvée (Dioptrie) sauvegardée réduit le risque de MM de 40%, ce qui représente une initiative très puissante, inégalée en termes de santé publique.
En effet, on estime que le coût global lié aux soins directs et aux coûts indirects de la myopie, en particulier la perte de productivité, a atteint 244 milliards de dollars américains en 2015. Correction et mieux contrôler l’évolution myope réduit ce fardeau financier.
La maladie de la myopie est donc officiellement reconnue et les moyens de contrôler son évolution sont également. Les impacts économiques directs et indirects sont également estimés et constituent un coût sociétal important.
Les raisons pour lesquelles tous les acteurs doivent maintenant lutter contre l’apparence de la myopie et son évolution deviennent évidents.
Les acteurs se mobilisent
Ainsi, le Conseil mondial de l’optométrie indique que le contrôle de la myopie doit être considéré comme une norme de pratique. La société mondiale des ophtalmologistes pédiatriques reconnaît la valeur du contrôle de la myopie et les mérites des moyens de contrôle, tout en encourageant les ophtalmologistes à les utiliser.
Le Canada vient de se équiper d’une loi sur la stratégie nationale des soins oculaires. Cela implique que le gouvernement canadien, en collaboration avec les provinces et autres acteurs, doit “soutenir la prévention et le traitement des maladies oculaires ainsi que de la réadaptation visuelle afin d’améliorer les perspectives de santé des Canadiens.» »
La lutte contre la myopie devrait faire partie de cette nouvelle perspective. De plus, les gouvernements devraient maintenant explorer les avenues qui seraient d’accord, avec les professionnels de la santé, des accords afin de couvrir le coût des examens visuels des enfants (ce qui n’est pas le cas dans toutes les provinces).
Une partie du coût de l’équipement requise, telles que les verres et les lentilles de la conception spécifiques de l’anti-myopie et des médicaments (atropine), doit également être couvert. En ce sens, le programme Québec mieux voir pour réussir est un pas dans la bonne direction.
En effet, bien qu’ils soient plus chers que les lunettes de correction myope standard, ces équipements ralentissent efficacement la myopie, et donc pour éviter ses conséquences nocives. Mais malheureusement, ils restent hors de portée pour un grand nombre de familles.
Les enfants d’environnements moins favorisés sont donc désavantagés. Et leurs perspectives d’éducation et de travail sont réduites par rapport aux enfants qui viennent de milieux riches et qui peuvent être traités de manière adéquate. En d’autres termes, leur qualité de vie est réduite.
La maladie de la myopie devient donc un problème de santé publique et un vecteur d’inégalité sociale. La décision – les fabricants devraient en prendre note et agir en conséquence.
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