Ce texte rassemble les capsules contenues dans notre newsletter politique, publiée le jeudi à 17h00. Vous y trouverez un regard en quatre points sur les événements politiques de la semaine.
Que faire d’un projet de plusieurs milliards de dollars qui patauge dangereusement ? Dessiner le plogue le plus rapidement possible pour économiser un maximum de billes (et de tickets) ? Ou rester calme, fixer l’horizon à moyen et long terme et croiser les doigts pour que tout se passe bien ?
Le gouvernement Legault a choisi la deuxième approche dans l’affaire Northvolt — s’il avait vraiment le choix. Car au-delà des sommes promises pour le giga-projet de l’entreprise suédoise, le gouvernement a également investi un énorme « capital politique » dans l’aventure. Northvolt n’est pas qu’un projet parmi d’autres dans le développement du secteur des batteries : c’est le projet phare, celui qui résume la vision économique de François Legault et Pierre Fitzgibbon – cette idée de profiter de la transition énergétique pour stimuler la croissance économique . Un échec avec Northvolt ressemblerait à un désastre.
Dans le contexte mouvementé des dernières semaines, les propositions des libéraux (retirer à Northvolt le bloc d’énergie alloué à ses activités, afin de le redistribuer à d’autres entreprises) et de Québec solidaire (ne plus mettre un sou dans Northvolt — la société financière) paquet prévoit des investissements par étapes) sont bons pour alimenter l’actualité… mais enverraient un signal bien étrange quant à la valeur de la signature de l’État québécois. Sous couvert de critique politique partisane, il y a quelque chose de panique (ou d’opportunisme) dans ces revendications.
Le Parti Québécois joue ici un rôle plus utile en demandant plus de transparence de la part du gouvernement : sur le risque financier couru par le Québec, sur la question environnementale, sur le volet énergétique… Le gouvernement aurait aussi tout avantage à clarifier un certain nombre de questions en suspens autour du projet. Si le niveau d’inquiétude est si élevé aujourd’hui, ce n’est pas seulement en raison de l’accumulation de mauvaises nouvelles concernant Northvolt. Dès le départ, le projet a été critiqué parce qu’on ne sait pas vraiment comment les décisions ont été prises – pourquoi Québec ne voulait pas d’un Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), pourquoi on a favorisé cette entreprise au allocation de mégawatts, pourquoi le gouvernement provincial a déjà dépensé des centaines de millions alors que le gouvernement fédéral n’a investi aucun dollar jusqu’à présent, etc.
«Il n’y a jamais rien de sûr en économie», a rappelé François Legault jeudi. C’est vrai. Mais une chose est sûre en politique : le manque d’information alimente le doute.
Le numéro
6,5 millions
Les partis d’opposition se sont bien amusés mercredi à s’indigner du fait que le gouvernement Legault ait accordé en 2022 une subvention de 6,5 millions pour que des golfeurs professionnels (et riches) de la (très riche) PGA viennent disputer cette semaine la Coupe des Présidents. à Montréal. Dans le contexte budgétaire actuel, où l’argent manque un peu partout, la décision de consacrer une telle somme pour attirer un événement sportif professionnel ne semble pas tout à fait radieuse… même si elle reste sujette à débat. Contrairement à la subvention accordée pour l’arrivée prochaine des Kings de Los Angeles au Québec (qui est considérée comme une « dépense promotionnelle »), celle pour le golf repose sur une anticipation de retombées économiques que Tourisme Montréal estime à une quarantaine de millions, sans compter les retombées indirectes découlant de la diffusion du tournoi (jamais à court de superlatifs quantitatifs, la ministre du Tourisme, Caroline Proulx, a promis cette semaine un milliard de téléspectateurs…). Le calcul serait donc bon… si on peut un jour le valider. En attendant, le défi politique consistant à justifier une aide à un sport professionnel qui ne manque pas totalement de ressources est, comme nous l’avons vu cette semaine, un peu difficile.
Le baromêtre
👍 Soulèvement
Gabriel Nadeau-Dubois a brillamment exposé cette semaine les limites du départ de François Legault jeudi dernier – lorsqu’il a ordonné (indirectement) au Bloc Québécois de voter en faveur de la motion de censure du Parti conservateur du Canada contre le gouvernement Trudeau. Le premier ministre a nié avoir ainsi souhaité l’élection d’un gouvernement conservateur majoritaire, mais quiconque a suivi un scrutin fédéral au cours de la dernière année a pu faire le lien. Ainsi le leader parlementaire de Québec solidaire s’est demandé au Salon rouge pourquoi François Legault avait « promu un parti dont le tiers des députés sont contre le droit à l’avortement » ou qui « défend les intérêts des Albertains et de leurs compagnies pétrolières ». Pierre Poilievre «n’a rien promis au Québec, sauf de l’argent pour le troisième lien», a-t-il aussi souligné. Le recadrage proposé par le Premier ministre lors d’un point de presse ce jeudi (il voulait, semble-t-il, simplement faire pression sur tous les partis fédéraux pour qu’ils s’engagent à réduire le nombre d’immigrants temporaires) a démontré à quel point la première intervention manquait de précision…
👎 En déclin
De combien d’heures de cours de français avez-vous besoin pour pouvoir soutenir une conversation de base ? Plus de 184, probablement — du moins dans le cas de la gouverneure générale du Canada, Mary Simon. Elle est allée cette semaine visiter un organisme communautaire à Lévis, et Le Journal du Québec J’ai pu constater que tout se déroulait uniquement en anglais, à part quelques expressions de politesse. Cela signifie donc qu’après trois ans en poste (et plus de 184 heures de cours, selon le décompte fait par la gouverneure générale elle-même en décembre 2023), Mary Simon n’arrive toujours pas à respecter son engagement à servir les Canadiens dans les deux langues officielles. — elle parle anglais et inuktitut. Interrogés sur la situation mercredi, plusieurs ministres libéraux ont ressorti les mêmes arguments entendus en juillet 2021 pour défendre la nomination de Mary Simon : elle est la première gouverneure générale autochtone au Canada, elle n’a pas pu apprendre le français lorsqu’elle était jeune, mais elle y travaille. Le problème, c’est qu’à ce rythme-là, elle terminera son quinquennat sans avoir pu converser une seule fois avec un francophone du pays…