Le nouveau sondage Léger, publié mercredi dans le média Quebecor, place toujours le Parti québécois (PQ) en tête des intentions de vote au Québec. Ce n’est pas la surprise, qui est plutôt du côté du Parti libéral du Québec (PLQ), dont le corps inanimé depuis les élections de 2022 semble agité par certains spasmes provoqués par sa course à la direction.
Mais d’abord, parlons aussi de l’effervescence des discussions politiques entre Québécois. L’enquête Léger confirme ce qu’on avait vu dans l’enquête Pallas Data du Qc125/Nouvellesc’est-à-dire qu’il existe de bonnes disparités dans les préférences électorales des sous-échantillons démographiques — entre les générations, les hommes et les femmes ainsi qu’entre les régions de résidence.
Dans tout le pays
Pour l’ensemble de l’échantillon, Léger place l’appui au PQ à 32 % chez les électeurs décidés et inclinés, un bond de trois points par rapport au précédent sondage réalisé fin août, se rapprochant ainsi du niveau mesuré par le sondage Pallas Data Qc125/.Nouvelles de la semaine dernière. Quant à la Coalition Avenir Québec (CAQ), elle stagne à 24 %. L’avance du PQ serait donc passée de cinq à huit points depuis le début de cette session parlementaire.
La bonne nouvelle pour François Legault et son équipe dans le sondage Léger, c’est le taux d’insatisfaction qui n’a pas changé. Les répondants se disent satisfaits de la performance du gouvernement Legault dans une proportion de 38 %, comparativement à 56 % qui se disent insatisfaits, soit les mêmes chiffres que lors du sondage d’août dernier. De plus, la CAQ est maintenant loin de son point bas de l’hiver dernier, où la satisfaction était tombée à 29 % et l’insatisfaction culminait à 64 %.
Un gouvernement qui accumule des années de service devient (un peu) moins impopulaire pendant la saison estivale, lorsque les électeurs ne le voient pas quotidiennement aux informations. Puis, lorsque la routine revient à l’automne, les tendances printanières reviennent également. La CAQ profite donc d’un cas exceptionnel, d’autant plus que la rentrée scolaire n’a pas été facile pour le gouvernement, avec des démissions et des revers dans le secteur des batteries ainsi que celui du réseau de la santé.
Les répartitions régionales du sondage Léger démontrent que le PLQ est en hausse dans la grande région de Montréal, où il est à égalité statistique avec le PQ. En supposant que le PQ soit projeté en tête dans les 450 couronnes, cela se traduit par un soutien gonflé aux libéraux sur l’île de Montréal. Ce qui serait évidemment une mauvaise nouvelle pour Québec solidaire, dont la base est traditionnellement située au cœur de la région métropolitaine.
Dans la Capitale nationale, l’écart entre le PQ et la CAQ s’est rétréci. Alors que l’avance du premier s’élevait à 14 points en août, Léger ne mesure désormais plus que 6 points entre les deux équipes. Malgré la taille modeste de ce sous-échantillon régional, une baisse de sept points pour le PQ au Québec (de 40 % en août à 33 % en octobre) est significative.
Ailleurs au Québec, la lutte fait toujours rage entre le Parti québécois (39 %) et la CAQ (31 %). Les autres partis, les Conservateurs à 12%, QS à 11% et le PLQ à 7%, restent loin derrière.
Visez la moyenne !
Léger donne au PQ une avance de neuf points sur la CAQ chez les électeurs francophones, un écart identique au sondage de la fin de l’été. Il s’agit d’un avantage crucial pour le PQ en matière de projections de sièges.
Ces 9 points d’avance sont toutefois beaucoup plus modestes que l’écart de 19 points entre le PQ et la CAQ mesuré par le sondage Pallas Data auprès des francophones à la fin septembre.
Cela démontre une fois de plus la nécessité d’être prudent avec le sous-échantillonnage, en particulier lorsque l’on compare les chiffres de différentes maisons en utilisant différentes méthodes d’enquête. Lorsque les échantillons sont plus petits, ils ont naturellement tendance à fluctuer davantage. Par exemple : avec un échantillon aléatoire de 1 000 répondants, la marge d’erreur du résultat sera de ±3%, 19 fois sur 20 (autour de la barre des 50%). Or, avec un sous-échantillon de 250 répondants — semblable à celui de la région de Québec dans ce sondage Léger — la marge d’erreur double à ±6 %, 19 fois sur 20. Ce qui, en théorie, pourrait plutôt donner un progrès à la CAQ en ce secteur.
Le graphique ci-dessous, qui compare les deux plus récentes enquêtes de Léger et Pallas Data, illustre cette fluctuation.
À l’échelle nationale, les deux enquêtes révèlent les mêmes tendances générales (elles ont été menées à seulement une semaine d’intervalle). C’est au niveau régional que des divergences apparaissent.
Dans la grande région de Montréal, Léger affiche le PLQ en tête avec 28 %, à égalité statistique avec le PQ, qui obtient 26 %. Chez Pallas, c’est plutôt une avance de 11 points dont bénéficie le parti souverainiste : 34 % pour le PQ, 23 % pour le PLQ. Ces chiffres donneraient des résultats très différents pour les sièges, mais, d’un point de vue statistique, ces deux paires de supports se situent bel et bien dans une fourchette acceptable.
Maintenant, si on trace une ligne dans le sable quelque part au milieu, disons le PQ à 30 % et le PLQ à 26 %, les deux sondages sont à la portée de cette moyenne. L’échantillon de Léger à Montréal est n = 327 et celui de Pallas est n = 560. Évidemment, l’échantillon de Léger est tiré de son vaste panel LEO et n’est pas entièrement aléatoire, mais le calcul de la marge d’erreur nous donne quand même un bon point de référence.
Leçon : faites confiance à la moyenne !
Signes de vie chez les libéraux
Le sondage Léger contenait également des informations intéressantes sur la course à la direction du Parti libéral du Québec. À la question : « Selon vous, laquelle des personnalités suivantes ferait le meilleur chef du Parti libéral du Québec ? », 24 % des personnes interrogées sur l’ensemble de l’échantillon choisissent celui qui était il y a encore quelques jours ministre fédéral des Transports, Pablo Rodriguez. Chez les partisans du PLQ, cette proportion s’élève à 30 %. Denis Coderre arrive loin derrière avec 11 % parmi l’ensemble de l’échantillon et 14 % parmi les électeurs PLQ.
Ces chiffres montrent que l’ancien lieutenant politique de Justin Trudeau jouit d’une visibilité bien plus élevée que ses rivaux : il devance tous ses adversaires, à l’exception de Denis Coderre. Toutefois, 52 % des sondés déclarent avoir une opinion défavorable de Denis Coderre, alors que seulement 13 % disent la même chose de Pablo Rodriguez.
Une autre tuile tombe sur la tête de l’ancien maire de Montréal et par ailleurs ex-ministre fédéral : sa cote d’approbation est dans le rouge même chez les électeurs libéraux : 39 % d’opinion favorable et 43 % d’opinion défavorable — soit un différentiel de -4. En revanche, le score net de Rodriguez parmi les électeurs du PLQ est de +31. Même en considérant la petite taille de ce sous-échantillon, les chiffres indiquent que Rodriguez est nettement plus populaire que Coderre auprès des électeurs du PLQ. Il n’y a pas de photo ici.
Il n’en reste pas moins que ce ne sont pas les électeurs libéraux qui choisiront le nouveau chef, mais les membres du parti selon un système de points par circonscription. Même si ces données Léger nous renseignent sur l’humeur et les préférences des électeurs, elles n’ont aucune valeur prédictive quant à l’issue de la course à la direction du parti, qui débutera officiellement en janvier et ne se terminera que près de six mois plus tard.
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Vous trouverez le rapport complet de l’enquête Léger ici.