Pour la première fois en Europe, l’œuvre majeure d’August Sander (1876-1964) “Les gens du 20ème Century”, 619 photographies prises entre 1892 et 1954, seront exposées dans leur intégralité au salon Paris Photo. L’ouvrage, divisé en sept chapitres et 46 portfolios, se voulait un échantillon représentatif de la société allemande à l’époque la plus troublée. époque de son histoire – entre l’Empire allemand, la République de Weimar et l’horreur nazie.
Les tirages exposés ont été réalisés dans les années 1990 par Gerd Sander, le petit-fils du photographe, et seront proposés en coffret sur le stand de la Galerie Julian Sander, l’arrière-petit-fils, pour plusieurs millions d’euros. Vous pouvez également les découvrir via une application, Collekton.
De cette œuvre extrêmement ambitieuse, quelques icônes sont surtout connues, dont un trio de jeunes paysans en tenue du dimanche se rendant au bal. Voici l’occasion de découvrir quelques images moins connues, et surtout de prendre la mesure, ou plutôt la démesure, de ce projet encyclopédique sur lequel Sander a travaillé toute sa vie, et qu’il n’a jamais achevé.
“Comme une mosaïque”
L’Allemand, qui a débuté comme photographe voyageur, aurait pu se contenter d’être un portraitiste de talent, immortalisant artistes, paysans ou notables chez eux, dans la rue ou dans son atelier. Mais après avoir côtoyé les artistes du groupe progressiste de Cologne dans les années 1920, il collectionne ses portraits et en fait une œuvre conceptuelle pionnière.
Son ambition ? Elaborer une typologie de la société allemande en sept grands chapitres : le paysan, le professionnel, la femme, les notables, les artistes, la grande ville, les exclus. Chaque image ainsi présentée cesse d’être le portrait d’un individu et prend le caractère d’un archétype, distingué par un vêtement, une attitude ou une coiffure : pâtissier, religieuse, institutrice, militaire. “Je ne peux pas montrer [my work] en une seule photo, voire en deux ou trois”, disait Sander en 1951. “La photographie est comme une mosaïque, qui ne devient une synthèse que lorsqu’elle est présentée en masse.”
Dans cette entreprise, Sander semble avoir mis un pied dans le passé et l’autre dans le futur. S’il se concentre sur les paysans, qui constituent pour lui le cœur de la société allemande, et présente les femmes comme des épouses, il capte aussi la modernité de la République de Weimar et le désir d’émancipation de ses contemporains : une secrétaire à la coupe de garçon, une femme politique.
« Les gens qui ont frappé à ma porte »
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