C’était une promesse faite en 2012 qui est sur le point d’être honorée. Ikea a annoncé mardi 29 octobre le versement de 70 millions de couronnes (6 millions d’euros) à un fonds national en faveur des victimes de la République démocratique allemande (RDA), qui doit être créé à Berlin dans les prochaines semaines. Par ce geste, le géant suédois du meuble reconnaît avoir eu recours au travail forcé de prisonniers politiques dans les usines de ses fournisseurs est-allemands dans les années 1970 et 1980.
Le scandale éclate en mai 2012, suite à la diffusion d’une enquête par la chaîne suédoise SVT. S’appuyant sur des informations obtenues à partir de 800 documents puisés dans les archives de la Stasi (la police secrète de l’ex-RDA), le documentaire révèle que l’entreprise, fondée en 1943 par Ingvar Kamprad, s’approvisionnait auprès de tous les grands fabricants de meubles est-allemands, à une époque où ils employaient des prisonniers dans leurs usines. En outre, il a également été révélé que la haute direction d’Ikea était au courant.
Un premier débat a eu lieu en Allemagne et en Suède en 1984, à la suite d’un incendie criminel dans l’un des magasins de l’entreprise à Wallau, en République fédérale d’Allemagne (RFA), probablement provoqué par une protestation contre le recours au travail forcé par les prisonniers politiques de la RDA. . Dans une interview au journal Le journal du soirKamprad a affirmé qu’un seul de ses fournisseurs était impliqué et qu’Ikea avait “immédiatement résilié le contrat” après en avoir été informé.
Mais le programme d’enquête de SVT a pu démontrer qu’en 1986, le canapé Klippan – un meuble emblématique de la marque, encore vendu aujourd’hui – était encore fabriqué par les détenus du pénitencier de Waldheim. Plusieurs anciens détenus ont témoigné. Parmi eux se trouvait le politologue allemand Wolfgang Welsch : incarcéré à la prison de Brandebourg après une tentative ratée de fuite vers l’Allemagne de l’Ouest, il a raconté en suédois le travail en trois équipes, la violence des gardiens et les papiers de livraison des meubles.
« Démarche responsable »
Ikea a d’abord nié les faits, avant de demander au cabinet de conseil Ernst & Young de mener une enquête. Publiées en novembre 2012, ses conclusions confirmaient que les fournisseurs du géant suédois avaient bel et bien eu recours à des « prisonniers politiques et criminels » et que « des représentants d’Ikea [were] à l’époque.” L’entreprise s’est alors engagée à payer des réparations aux travailleurs exploités.
Il a fallu 12 ans pour que cela se concrétise, sous la forme d’une contribution de 6 millions d’euros au Fonds d’aide aux victimes de la RDA, en cours d’organisation. “Nous regrettons profondément que cela se soit produit”, s’est excusé mardi 29 octobre Walter Kadnar, le patron d’Ikea en Allemagne.
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