Ce texte rassemble les capsules contenues dans notre newsletter politique, publiée le jeudi à 17h00. Vous y trouverez un regard en quatre points sur les événements politiques de la semaine. Vous pouvez vous inscrire ici.
Début 2024, François Legault exprimait le souhait de connaître « une bonne année politique, avec moins de distractions qu’en 2023 ». Toutefois, à moins d’un retournement de situation d’ici Noël, les résultats risquent d’être mitigés.
En ce qui concerne les distractions, aucune subvention n’a été accordée aux Kings de Los Angeles pour alimenter la controverse. Mais il y a eu la saga des cocktails de financement à 100 $ ; encore une décision étonnante dans le troisième dossier de lien (commander une étude à CDPQ Infra, et faire exactement le contraire de ce que recommande l’étude); ainsi que les départs de Pierre Fitzgibbon, Youri Chassin et Eric Lefebvre. Autant de dossiers qui ne répondaient pas tout à fait à la volonté du Premier ministre de se concentrer sur ses cinq priorités : la santé, l’éducation, l’économie, l’environnement et l’identité.
Il serait également très difficile de qualifier 2024 de « bonne année politique » pour la Coalition Avenir Québec. Il y a tout juste un an, un sondage Pallas-Nouvelles place le Parti québécois devant la CAQ, pour la première fois depuis l’arrivée au pouvoir de François Legault. Depuis, l’écart entre les deux partis s’est creusé, jusqu’aux 14 points mesurés cette semaine par Léger (35 % d’appui au PQ, 21 % à la CAQ). C’est trois fois plus que ce qu’avait mesuré Léger à la fin de l’été (cinq points d’écart à ce moment-là), signe que la dernière séance a été aussi dure que la précédente.
François Legault possède une expérience politique suffisamment longue (il y est depuis septembre 1998) pour comprendre le sens des chiffres présentés dans le sondage du média Quebecor. Son parti a perdu la moitié des soutiens obtenus lors des élections d’octobre 2022. À 21 %, c’est son pire résultat dans un sondage Léger depuis le printemps 2016. C’est aussi deux points de moins que lors des élections de 2014. , ce qui donne à la CAQ 22 députés. À la fin de l’été 2023, le gouvernement Legault affichait encore un taux de satisfaction de près de 50 % ; cette semaine, il est à 32 %. Et sur la question de savoir qui ferait le meilleur premier ministre parmi les dirigeants en poste, Paul St-Pierre Plamondon devance François Legault d’une bonne dizaine de points. Le PQ domine partout au Québec, et très largement auprès de l’électorat francophone (44% d’appui, 20 points d’avance sur la CAQ).
Nous savons qu’une seule enquête ne crée pas de tendance… mais toutes les enquêtes de l’année dernière racontent essentiellement la même histoire. Celle d’un parti qui, quelques mois après une réélection tonitruante, se retrouve en plein déclin – et qui n’arrive pas à reprendre pied. François Legault a confié à plusieurs reprises qu’il serait candidat en 2026 si sa santé le lui permettait, et si la population du Québec le voulait. Sur ce dernier point, la réponse commence à devenir assez évidente. Ce qui risque de contribuer à une autre « distraction » : les rumeurs sur l’avenir du Premier ministre…
Le numéro
33%
Si vous êtes un chercheur qui aimerait décrypter le vote des jeunes Québécois, sachez qu’il y a matière à réflexion (et confusion) dans le dernier sondage Léger. Au niveau provincial, c’est Québec solidaire qui arrive en tête chez les 18-34 ans, avec 33 % d’appui. Alors les jeunes seraient plutôt à gauche ? Pas si vite. Car au niveau fédéral, c’est le Parti conservateur du Canada qui arrive en première position, avec également 33 % de soutien des mêmes répondants au sondage. Les jeunes sont donc – comme on vient de le constater aux États-Unis – en train de se diriger enfin vers la droite ? Pas si vite (encore). Au fédéral, le Nouveau Parti démocratique (27 %) arrive en deuxième position, avec un soutien deux fois supérieur à celui qu’il obtient au total au Québec (13 %). Même phénomène, mais à l’envers, à l’échelle provinciale : après le Parti Québécois (23 %), on retrouve le Parti conservateur du Québec avec 21 % d’appui chez les jeunes, soit deux fois plus que son appui général (11 %). . Cela veut dire qu’il nous faudra plus qu’une enquête avant de tirer des conclusions majeures. Mais on peut au moins déjà noter une constante : les 18-34 ans, tant au provincial que au fédéral, sont contre les gouvernements en place. La CAQ a reçu 14 % de soutien de leur part, et les libéraux de Justin Trudeau 17 %…
Le baromêtre
👍 Soulèvement
Nommé en juillet 2024, le ministre fédéral du Travail Steven MacKinnon n’a pas chômé depuis – vraisemblablement le contraire serait illégal pour ce poste, mais bon. Les conflits ferroviaires impliquant les travailleurs du CN et du CPKC (en août), ainsi que ceux touchant les ports de Montréal, de Colombie-Britannique et de Québec, ont nécessité une réponse politique rapide… ce qui n’est pas nécessairement le propre du gouvernement Trudeau. Or, dans les deux cas, le ministre aura choisi d’utiliser l’article 107 du Code canadien du travail, qui lui permet d’imposer (par l’intermédiaire du Conseil canadien des relations industrielles) un retour au travail et un arbitrage exécutoire. Pour justifier sa décision sur le dossier portuaire, le ministre a pris soin d’expliquer cette semaine tout ce qui était en jeu : d’une part, le respect du droit de grève et l’idée qu’un accord négocié est toujours préférable ; de l’autre, les conséquences économiques liées au conflit, le constat du blocage des négociations, etc. Il sera intéressant de voir ce que pensent les tribunaux de l’interprétation large que fait le gouvernement de l’article 107, qui donne un pouvoir énorme au ministre (sans débat au Parlement). Mais d’emblée, on peut constater que la réponse du ministre a été soutenue, qu’elle a été expliquée en détail et qu’elle a pris en compte les effets du conflit sur d’innombrables citoyens.
👎 En déclin
Il y avait quelque chose d’ironique à entendre la ministre de la Famille, Suzanne Roy, affirmer dans diverses entrevues cette semaine que le Québec ne tolérait pas que les garderies financées par l’État aient des critères d’admission basés sur l’appartenance religieuse ou l’origine ethnique des enfants. Elle a réagi à la publication d’un dossier dans La presse où il a été démontré qu’au moins 36 garderies avaient précisément de tels critères d’admission. Et en réalité, le Québec le tolère, par passivité, disons. “Si des plaintes pour discrimination fondée sur l’origine ethnique ou la religion étaient portées à notre attention, nous envoyions immédiatement nos inspecteurs pour intervenir”, a déclaré M.moi Roy. Le problème est qu’il n’y a eu qu’une seule plainte ces dernières années… Certaines garderies continuent d’afficher publiquement des politiques d’admission qui contreviennent clairement à ce que prévoit la Loi sur les services. l’accueil éducatif de l’enfance (il interdit que l’admission d’enfants soit liée « à l’apprentissage d’une croyance, d’un dogme ou à la pratique d’une religion déterminée »). Le problème ne devrait plus en être lorsque le guichet unique d’accès aux garderies subventionnées — qui sera géré par Québec et imposera les mêmes critères d’admission à tous les établissements — sera en opération, soit à l’automne 2025. en attendant, il y a visiblement des failles dans le système…