Ici, il était une fois, il y avait une vraie ville. Ou au moins un morceau de celui-ci, un carré. Mais autour de la pointe bondée de la célèbre fontaine de Trevi à la mi-mars, au début de la longue saison touristique de Rome, il y avait un détail qui pouvait confirmer que tout avait changé, que la ville avait disparu et que ce qui restait n’était qu’un fantasme.
La foule a poussé contre une longue barrière installée en décembre pour organiser le flux de personnes devant la piscine, qui scintillait avec des pièces. C’est l’un des monuments les plus célèbres de Rome, un chef-d’œuvre baroque du 18ème siècle, et il est transformé en une attraction que les visiteurs pourraient bientôt avoir à payer pour voir: la ville envisage de demander aux visiteurs de payer 2 € pour l’accès. Bien que Rendrait l’ordre bienvenu au chaos touristique, les Romains les plus désillusionnés le voient comme un signe avant-coureur de la transformation définitive de leur centre-ville en parc d’attractions. Un endroit où les habitants de la ville ordinaire n’appartiennent plus.
Le son des sifflets retentit. Les gardes de sécurité autour de la fontaine ont châtié les touristes avec des jambes fatiguées qui voulaient s’asseoir sur le bord après avoir pris leurs selfies. “Parfois, nous avons l’impression de s’occuper d’un troupeau de moutons. Ils ne nous voient même pas. Ils ne regardent même pas la fontaine, seulement via l’écran de leur téléphone”, a déclaré un gardien de sécurité avec démission (il voulait rester anonyme). Il s’est soudainement arrêté, pour appeler: “Descendez s’il vous plaît!” à certains touristes américains s’attardant au sommet des escaliers. Pour se reposer, les touristes devraient aller sur les bancs de l’église Santi Vincenzo E Anastasio, juste en face, où les religieuses latino-américaines fatiguées vendent des images saints et des chapelets en plastique. Dans la Rome d’aujourd’hui, la liberté d’Anita Ekberg et Marcello Mastroianni, les amoureux du film de Federico Fellini La Dolce Vitaqui a embrassé dans la fontaine une soirée d’été en 1959, c’est plus que jamais un rêve.
Vous avez 87,06% de cet article à lire. Le reste est réservé aux abonnés.