La soirée électorale lundi a été l’opposé de la campagne qui l’a précédée: pleine de rebondissements, de mouvements et de surprises. Le chef libéral Mark Carney est un gagnant, mais il dirigera probablement un gouvernement minoritaire qui aura besoin d’un soutien pour gouverner. Cela a été confronté à une très forte opposition conservatrice … et dans un pays divisé.
À 6 heures du matin mardi matin, les libéraux de Mark Carney ont reçu des gagnants dans 168 districts, quatre députés pour obtenir une majorité. Avec 144 sièges, les conservateurs de Pierre Hairy ont dépassé les attentes, mais reviendront néanmoins au Parlement dans le même rôle d’opposition officielle que depuis 2015.
Les libéraux ont réalisé des gains notables au Québec, mais ont laissé la majorité s’échapper de l’Ontario, où les conservateurs ont fait plusieurs percées. Par rapport aux résultats de 2021, les libéraux augmentent de 8 sièges, tandis que les conservateurs gardent 25 sièges supplémentaires (5 circonscriptions ont été ajoutées à la carte électorale depuis).
Cela a été fait aux dépens du Bloc Québécois (23 députés, une baisse de 9 par rapport aux dernières élections), mais surtout du New Democratic Party (18 sièges de moins). Avec 7 députés, le NPD enregistre le pire résultat de son histoire et perd son statut de parti officiel à la Chambre des communes. Le chef Jagmeet Singh, battu dans sa circonscription, a annoncé sa démission. Parmi les verts, seule Elizabeth peut survivre à son île de Vancouver.
Dans ce tableau, l’influence future les unes des autres est restée pour spécifier après le comptage de 99% des bureaux de vote. Comme le seuil de la majorité est de 172 sièges, le Bloc Québécois et le NPD pourront en effet réclamer l’équilibre des pouvoirs (comme ce fut le cas dans les deux dernières législatures). Il est resté mardi matin tout de même environ trente circonscriptions où il était encore impossible de déclarer le vainqueur.
Ce n’était pas le cas dans celui de Carleton, au sud d’Ottawa: Bruce Fanjoy libéral a facilement battu son rival conservateur, Pierre Hairyvre. Le chef de l’opposition a toujours l’intention de rester.
Dans tous les cas, la situation obligera de toute façon le nouveau Premier ministre Carney à un équilibrage politique qui aurait certainement préféré éviter, celui qui espérait un “mandat fort” pour faire face “à la crise la plus grave de nos vies”, c’est-à-dire ce conflit direct avec les États-Unis. Son mandat n’est pas faible en soi, mais il sera plus complexe que souhaité.
Un Canada déchiré
Le successeur de Justin Trudeau aura également besoin de doigts politiques pour ramasser un pays qui apparaît ce matin profondément divisé et clairement polarisé. Avec respectivement 43,5% et 41,4% de soutien, les libéraux et les conservateurs ont monopolisé 85% des voix, de la part de depuis 1958. À peine 400 000 voix (sur plus de 19 millions) séparent les libéraux des conservateurs. Le taux de participation était de 67%, très légèrement plus élevé qu’en 2021, malgré le contexte historique.
Mais la polarisation va au-delà des chiffres: il y a des fractures idéologiques au Canada, et il est douteux que le résultat des élections de lundi les apaise la magie. Comment l’Alberta réagira-t-elle à l’élection d’un quatrième gouvernement libéral consécutif? Et comment le mouvement soulevé et nourri par Pierre Hairy trouvera-t-il son compte dans une nouvelle dynamique en fin de compte très similaire à la précédente? Le dossier de Donald Trump occupera certainement beaucoup Mark Carney dans les prochains mois, mais celui d’un Canada pour être également uni. Il naviguera sur une mer orageuse.
Le Premier ministre élu semblait toujours satisfait des résultats au début de la nuit. Les libéraux ont certainement échappé à la majorité qu’ils recherchaient, mais il faut se rappeler qu’ils ont été promis un massacre électoral au moment de la démission de Justin Trudeau – et l’arrivée de Donald Trump au pouvoir – en janvier. La victoire de lundi est à plusieurs égards inattendue. L’inconvénient de la minorité ne change pas le fait que Mark Carney est Premier ministre et qu’il a une véritable légitimité pour exercer la fonction.
Pour chaque fête, les résultats de lundi peuvent également être lus avec certaines nuances. Pierre Hairyis a certainement laissé tomber un immense ballon, mais il a avancé les conservateurs de tout le pays, et a obtenu un soutien populaire plus grand que Stephen Harper en 2011. En temps normal, les conservateurs auraient dû gagner avec un tel résultat.
Yves-François Blanchet a perdu plus d’un quart de son caucus … mais il a également sauvé les meubles et pourrait avoir un poids politique plus important que ces dernières années, s’il joue bien ses cartes et que Mark Carney est réceptif pour collaborer avec les séparatistes. Quant à Jagmeet Singh, le verdict est cruel et la défaite, cinglante. Le NPD ne sera même plus une formation reconnue à la Chambre des communes, à moins qu’un accord spécial. Mais comme le parti aura également l’équilibre des pouvoirs, il réduit (légèrement) la débâcle.
Ces deux dernières parties ont beaucoup perdu lundi. Mais ils n’ont pas tout perdu … et Mark Carney aura besoin de leur aide dans les prochains mois.