D’un côté, il y a un somptueux palais au bord de la mer Noire, dont la construction aurait coûté plus d’un milliard d’euros. De l’autre, une luxueuse datcha au bord d’un des innombrables lacs de la république russe de Carélie, à la frontière avec la Finlande. Près de 2 000 kilomètres séparent les deux propriétés, mais elles ont un point commun : leurs environs immédiats sont régulièrement fréquentés par les gardes du corps de Vladimir Poutine.
Le président russe est-il l’heureux propriétaire de ces résidences secondaires ? C’est du moins ce que prétendent ses opposants : feu Alexeï Navalny a affirmé que Poutine était propriétaire du palais en 2021, et plus récemment l’ex-oligarque Mikhaïl Khodorkovski a mis la datcha sous les projecteurs, par le biais de l’unité d’enquête du Centre de dossiers qu’il finance. Des accusations embarrassantes sur la prétendue fortune du président russe, que le Kremlin a toujours vigoureusement écartées. Cependant, Le monde a découvert de nouvelles informations qui donnent encore plus de crédit à ces accusations.
Dans une série d’enquêtes, nous avons révélé comment les gardes du corps des présidents français et américains partagent des informations sur les déplacements des dirigeants de leur pays. Une faille de sécurité aux proportions inédites liée à leur utilisation compulsive de Strava, une application sportive que les sportifs utilisent pour enregistrer et partager leur activité. La plupart de ces activités sont géolocalisées, ce qui permet de suivre les déplacements des dirigeants mondiaux, de savoir à l’avance où ils séjournent, mais aussi de découvrir presque tout sur la vie privée de ces agents peu rigoureux.
Des gardes du corps révèlent où ils se trouvent en ligne
Poutine ne fait pas exception ; il a également été trahi par la négligence des membres du Service fédéral de protection (OFS). C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase pour le chef du Kremlin qui, par prudence, n’utilise ni smartphone ni ordinateur connecté à Internet, et dont le bureau a été reconstruit à l’identique dans chacune de ses résidences pour que personne ne sache jamais où il se trouve. .
Les 13 et 14 novembre 2019, Poutine s’est par exemple rendu à Brasilia pour participer à un sommet international réunissant les dirigeants des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). Mais le 11 novembre, Andrei (tous les prénoms ont été modifiés), un agent de l’OFS, était déjà sur place. Pour repérer et sécuriser le site, il a séjourné à l’Hôtel B, le même établissement où Poutine s’apprêtait à séjourner. Alors, en attendant son arrivée, Andrei a fait un jogging de huit kilomètres, commençant et finissant au pied de l’hôtel. Une activité qu’il a enregistrée via Strava. Ces informations confidentielles et hautement sensibles ont fini par être partagées publiquement en ligne.
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