Les Sages ont constaté une « dégradation du service rendu » ces dernières années, avec notamment un « allongement de la durée moyenne » des passages, facteur de surmortalité.
Des solutions concrètes. Dans un rapport publié mardi 19 novembre, la Cour des comptes a énuméré onze recommandations afin d’endiguer l’engorgement des services d’urgence victimes de “dysfonctionnements du système de santé”, soulignant que les réformes engagées depuis 2018 doivent être “accélérées”.
Symbole de la crise hospitalière, les services d’urgence – que le président Emmanuel Macron avait promis de désengorger d’ici fin 2024 – sont toujours touchés par le manque de personnel et saturés de patients, qui stagnent parfois plus de 24 heures sur des civières.
Les 694 structures d’urgence ont enregistré 20,9 millions de visites en 2022, un chiffre en augmentation constante depuis 1996 (hors Covid-19). La Cour constate une « dégradation du service rendu » ces dernières années, avec notamment un « allongement de la durée moyenne » des passages, facteur de surmortalité.
Pistes
La Cour des comptes suggère donc de coordonner les équipes intervenant à la demande du « Sas » (service d’accès aux soins, associant Samu et médecins de ville) et celles engagées dans la permanence des soins de ville le soir et le week-end (PDSA).
Le territoire reste peu couvert par le PDSA, observent les magistrats, posant “la question du rétablissement de la participation obligatoire” des médecins libéraux (supprimée en 2003), “couplée à des mesures d’équilibrage territorial” des établissements de praticiens.
Les centres privés de soins non programmés, qui se multiplient et « captent des ressources humaines rares », doivent être soumis à un « régime d’autorisation spécifique », jugent-ils.
Dans les hôpitaux, le rapport appelle à « systématiser les filières d’hospitalisation directes » pour les personnes âgées, sans passage aux urgences, à « généraliser les équipes territoriales d’urgence » (regroupant les médecins urgentistes au sein d’un bassin de population), et à travailler sur la « gestion des lits en aval ». à l’échelle territoriale, pour rediriger rapidement les patients nécessitant une hospitalisation.
Enfin, ils plaident pour consolider et améliorer les données liées aux urgences, suivre l’activité et la facturation, et rendre publiques les informations en temps réel sur les services ouverts et les temps d’attente.
« Points à améliorer »
A l’été 2022, la crise est devenue “majeure”, obligeant l’exécutif à autoriser des fermetures temporaires, notamment la nuit, ce qui a soulagé les soignants mais “diminué le principe d’accueil inconditionnel et permanent” qui prévalait, a rappelé, lors d’une conférence de presse, le Président de la Cour Pierre Moscovici.
Plusieurs phénomènes se conjuguent : les médecins se raréfient en ville, notamment la nuit et le week-end, poussant à l’hôpital les patients qui ne nécessitent pas de soins d’urgence ; la population vieillit et nécessite davantage de soins ; et le manque de lits « en aval » pour hospitaliser les patients ralentit les « sorties ».
« De nombreux axes d’amélioration ont été portés » par les réformes depuis 2018, mais « les urgences restent l’exutoire de tous les dysfonctionnements du système de santé », a-t-il déclaré.
Les mesures destinées à améliorer l’offre de soins en ville, notamment, “va dans le bon sens” mais ne sont “pas à la hauteur des adaptations nécessaires”, estime le rapport. Certaines, comme la délégation de tâches aux soignants paramédicaux, se heurtent à des « résistances au changement » et à des procédures complexes qui les « neutralisent », déplorent encore les Sages.