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La polémique suscitée par les propos du député solidaire Haroun Bouazzi a mis cette semaine sur le devant de la scène une question à laquelle il est visiblement impossible de répondre précisément : qu’est-ce qu’un réveillé ?
C’est que le chef péquiste, Paul St-Pierre Plamondon, a réagi à l’affaire Bouazzi (qui affirmait récemment avoir vu chaque jour à l’Assemblée nationale « la construction de cet autre qui est maghrébin, qui est musulman, qui est noir, qui est indigène, et de sa culture qui, par définition, serait dangereuse ou inférieure”) en s’engageant mercredi dans une charge à fond contre le wokisme.
Pour le chef péquiste, « le wokisme est un mouvement à proprement parler antidémocratique, qui refuse le dialogue et qui utilise l’intimidation et la désinformation pour imposer son agenda ». C’est aussi une démarche qui consisterait à « déformer la parole des autres, déformer la réalité pour organiser des procès d’intention », avant de faire taire ceux qui ne sont pas d’accord en les traitant de « racistes ou intolérants ».
Il a dressé aux journalistes présents une liste de « concepts brumeux » que le réveillé voudrait imposer au Québec : « le racisme systémique, le privilège des blancs, l’écriture inclusive, espaces sûrsla culture de l’annulation [annulation] »… Conclusion de Paul St-Pierre Plamondon : « Les gens en ont marre, moi en premier. » Les réactions, pour et contre, ont été vives.
Ce nouveau cycle d’actualités mettant en vedette réveillé et le wokisme rappelle à quel point ce débat est devenu prédominant dans l’espace public québécois ces dernières années.
En mai 2021, ma collègue Marie-Hélène Proulx a publié un long rapport sur cette « gauche inquiétante », dans lequel elle a soigneusement exploré les contours du wokisme, les revendications que formule le mouvement et les critiques qu’il soulève. Pourtant, si le thème était déjà dans l’air du temps à cette époque, il a pris depuis une toute autre importance.
Sur la scène politique notamment, les acteurs rivalisent d’inventivité pour définir ce qu’est le wokisme et quels sont les objectifs du wokisme. réveillé. À l’automne 2021, François Legault a mis le feu aux poudres en accusant Gabriel Nadeau-Dubois (qui l’avait associé à Maurice Duplessis) d’être réveillé. Soit « une personne qui veut nous faire culpabiliser de défendre la nation québécoise et ses valeurs », a-t-il ensuite expliqué.
Pour le chef conservateur Éric Duhaime — qui a déjà qualifié tous les partis présents à l’Assemblée nationale de réveillé —, il s’agit plutôt d’un « courant idéologique qui exacerbe les tensions entre majorité et minorités ». À Ottawa, son homologue Pierre Poilievre parle d’une « idéologie bizarre qui veut tout effacer, sauf l’État qui contrôlerait tout et tout le monde ». Le chroniqueur Mathieu Bock-Côté, qui manque rarement une occasion d’enfoncer ce clou dans le mille, en parlait (notamment) en 2020 comme d’un « fléau idéologique » incarné par une « gauche haineuse, sectaire, intolérante, fanatique ».
On pourrait continuer longtemps, l’exercice est assez amusant : il n’y a pas de plus fourre-tout que ce débat. Mais je propose plutôt de plonger dans le texte de Marie-Hélène, qui, comme toujours, a trouvé le juste équilibre des points de vue pour bien comprendre un sujet délicat. Le débat a beaucoup évolué depuis, mais les fondements de la réflexion restent les mêmes.
C’est votre rétroviseur de la semaine.
Bonne lecture !
Guillaume Bourgault-Côté, chef du bureau politique
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