L’idée est née une nuit de février 2024 alors que la guerre à Gaza perturbait une nouvelle fois le sommeil de Fabrice Virgili, historien et directeur de recherche au CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique), spécialiste de la guerre. zones. “Alors que les bombardements israéliens rayent Gaza de la carte et que notre sentiment d’impuissance grandit, que pouvons-nous faire en tant que chercheurs ?” Dresser un inventaire du patrimoine bombardé de Gaza et suivre l’état de destruction de chaque site classé par l’UNESCO semblait une option académiquement valable et symboliquement importante.
Le lendemain matin, dans l’ascenseur du Campus Condorcet, centre de recherche en sciences humaines et sociales d’Aubervilliers qui regroupe 11 universités, il partage l’idée du projet avec des collègues dont Malika Rahal, historienne et directrice de l’Institut d’Histoire du Temps. Présent, et Eric Denis, directeur de recherche à l’équipe de recherche Géographie-cités du CNRS. Après quelques coups de téléphone et de multiples rencontres, le trio a réuni une douzaine de chercheurs – historiens, archéologues, politologues, géographes, sociologues, spécialistes des conflits et des vestiges de guerre – qui partageaient la même envie d’agir.
Pour documenter la destruction, l’équipe s’appuie sur des données numériques open source (OSINT), notamment celles du Centre satellitaire des Nations Unies (UNOSAT), ainsi que sur des cartes produites par l’UNESCO et l’Université d’Oxford. Cette dernière a développé un système de détection automatique des changements (ACD) utilisant Google Earth Engine (GEE). L’inventaire comprend des cinémas, des bibliothèques, des musées (comme Qasr al-Basha) et des cimetières. La répartition de la documentation sur les infrastructures est répartie en fonction de l’expertise de chaque chercheur.
Ressources d’images satellites
Parmi les sites documentés figurent le souk Al-Qissariya, un marché emblématique au cœur de la vieille ville de Gaza, et le cinéma An-Nasr, construit en 1956 et symbole de l’âge d’or du cinéma palestinien. “Il est de notre responsabilité d’enregistrer l’histoire de chacun de ces lieux et de contribuer à préparer au mieux leur restauration ou, à tout le moins, à préserver leur mémoire”, ont écrit les chercheurs sur leur site Gaza Histoire.
Les chercheurs s’appuient également sur les travaux de huit groupes de recherche indépendants, dont Forensic Architecture, basé à Londres, qui a mené une étude sur les zones agricoles, et l’Institut des études palestiniennes, qui s’est penché sur les infrastructures du système de santé. À l’heure où 139 journalistes ont été tués par les forces israéliennes dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre 2023 et où l’accès aux médias étrangers est interdit, l’imagerie satellite offre une fenêtre cruciale sur l’enclave de Gaza. Malgré de fréquentes coupures de communication et d’Internet, les universitaires échangent régulièrement des informations avec leurs collègues gazaouis spécialisés dans la préservation du patrimoine.
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