Un projet de loi visant à expérimenter une “carte vitale” de nourriture, créditée de 150 euros par mois, est examinée ce jeudi 20 février par l’Assemblée. Une initiative soutenue par des acteurs locaux, qui connaissent des projets similaires depuis plusieurs années.
Dans Amiens (Somme), Lucien Fontaine propose ses légumes – bio et saisonniers – pour seulement 3 ou 4 euros. L’ancien assistant du maire socialiste n’est pas le jardinier du marché, mais le président de l’Association LA Collab, qui distribue ces paniers à un prix trois fois moins cher que l’équivalent en grande distribution.
Pour réussir à afficher de tels prix, l’ancien fonctionnaire élu travaille avec des jardiniers de marché qui acceptent de réduire leur marge et de s’appuyer sur les entreprises locales, qui acceptent d’investir dans ces marchés de solidarité en échange d’une réduction de l’impôt. Une initiative que Lucien Fontaine imagine comme les prémisses d’une «sécurité sociale de l’alimentation» généralisée partout en France.
“Imaginez que nous avons une collaboration entre les autorités publiques et les agriculteurs qui jouent au jeu de la vente de biens de qualité au bon prix”, rêve Lucien Fontaine. “Que les utilisateurs ont la possibilité de dépenser un certain montant par mois parmi ces mêmes producteurs.”
“Peut-être que nous n’aurons plus besoin de dépenser des milliards pour endiguer les conséquences de la malbouffe dans notre système de santé”, espère-t-il.
Ce système pourrait, selon lui, “satisfaire des jardiniers du marché” qui traversent une crise depuis plusieurs années et “sans qui la population se nourrit mal, préférant des produits ultra-transformés saturés de graisses, de sel ou de sucre”. Ces derniers représentent aujourd’hui sept produits sur dix dans l’offre de supermarché, selon une étude de l’ONG Foodwatch datée de 2023.
150 euros par mois et par adulte
Ce que Lucien Fontaine a mis en œuvre à Amiens, certains aimeraient le généraliser – sous une forme différente – au niveau national. Un projet de loi visant à expérimenter une nouvelle «carte vitale» de nourriture devrait être examinée ce jeudi 20 février, dans le cadre du «niche» parlementaire des députés environnementaux à l’Assemblée nationale.
L’idée du texte serait d’allouer une somme de 150 euros par mois et par adulte à manger pour garantir “une sécurité sociale pour tous”. “Avec la possibilité, à long terme, de voir quelques dizaines d’euros supplémentaires par enfant, spécifie Boris Tavernier, député EELV du 2e district du Rhône.
Une somme de base temporairement fixe, “assez logique dans la perspective d’un projet visé, pour le moment, L’expérimentation “, estime le parlementaire, également fondateur de la Bulk Association, qui souhaite promouvoir le développement de groupes d’achat dans les quartiers prioritaires.
“Même si nous sommes appelés Bernard Arnault, nous pouvons en bénéficier”, résume l’élu. “Il s’agit d’un principe d’égalité universelle: 150 euros par mois quoi qu’il arrive.”
Ce crédit pourrait alors dépenser pour les achats de nourriture “dans des endroits convenus démocratiquement”, a déclaré mardi le député lors d’une conférence de presse à Paris.
“Le sens de l’histoire”
80 ans après la création de la sécurité sociale en France, les députés environnementaux croient que l’établissement d’une carte alimentaire “suit le sens de l’histoire”. “Sa vocation est de nous protéger” contre la malbouffe, a expliqué le rapporteur du texte, Charles Fournier, mardi sur BFMTV.
“Nous savons que certains s’abstiendront et feront des doutes sur le financement, en particulier”, a déclaré Boris Tavernier. “C’est toujours un point sur lequel l’hémicycle se déchire. Je veux dire aux autres députés qui doivent être écoutés et comprendre que la sécurité sociale de la nourriture est viable.”
Selon l’AFP, la mesure est financée par des fonds publics allant jusqu’à 50%, par les autorités locales à 25% et grâce à une contribution volontaire des citoyens pour les 25% restants. “Selon les besoins et selon ses moyens”, a déclaré Charles Fournier sur BFMTV.
Pour Lucien Fontaine, cette initiative montre que le sujet “devient sérieux”. “Dans Amiens, nous avons vu que cela était possible tout en restant à droite et en étudiant les différentes variables du système”, a-t-il déclaré. “Avec une grande expérience à l’échelle, que le texte permettrait, nous réaliserons inévitablement quoi ajuster.”