L’auteur est professeur de sciences politiques au Royal Military College et à l’Université Queen’s à Kingston en Ontario. La recherche de ce spécialiste des politiques canadien se concentre sur les langues officielles, le fédéralisme et la politique judiciaire.
Ce jeudi soir, les Ontariens reviennent des urnes … au moins 12 mois plus tôt que prévu. Mais pour les électeurs, la campagne est terminée depuis longtemps. Le retour de Doug Ford à Queen’s Park a été prévu depuis la dissolution de l’Assemblée législative, et les quelques semaines de campagne n’ont pas changé la tendance.
Doug Ford est resté, confronté à la menace des prix de Donald Trump, l’homme de la situation à leurs yeux.
On ne peut pas dire qu’il n’a pas bien mis la table pour cette campagne électorale, remportant en décembre dernier en tant que “Captain Canada” dont la nation canadienne avait besoin à un moment crucial lorsque la souveraineté du pays était sapée. Profitant de son statut de président de la Fédération de la Fédération et du vide évident en termes de leadership à Ottawa, Doug Ford a joué des marqueurs avec ses homologues provinciaux, mais il a également été vu sur les chaînes de télévision américaines pour plaider la cause du “bon voisin” canadien à qui les Américains ne devraient avoir aucune raison d’attaquer.
Que ce thème a dominé la campagne avec un slogan progressiste-conservateur sur mesure pour souligner cette cause, “protéger l’Ontario” – n’est donc pas trivial. Cela a permis à M. Ford de lui garder les projecteurs pendant la campagne, au détriment de ses adversaires qui ont eu du mal à transmettre leurs messages.
Mais l’accent mis sur la crise causée par les prix a également permis à Doug Ford d’esquiver de nombreux pièges qui auraient autrement été tendu dans le cadre d’une campagne provinciale habituelle.
Cependant, ce ne sont pas les munitions qui n’avaient pas les partis d’opposition pour attaquer le Premier ministre sortant, dont l’évaluation de la santé et de l’éducation est loin d’être brillante et qui a présenté le plus de budget de dépenses dans l’histoire de la province l’année dernière.
Les scandales le concernant continuent également de s’accumuler: le coût astronomique de la libéralisation de la vente de l’alcool dans la province, les décisions, contre les citoyens de Toronto, pour permettre la construction d’un spa privé à la place emblématique de l’ontario (l’équivalent du parc de jean-drapeau à Montreal) et pour supprimer les voies cyclettes du capital provincial …
Mais surtout, la campagne a négligé le plus grand scandale avec lequel le gouvernement de Doug Ford est aux prises: l’enquête criminelle du RCC sur la célèbre ceinture de verdure. L’ouverture à la construction immobilière de terres protégées dans la banlieue du Grand Toronto par le Premier ministre en 2022 aurait profité des promoteurs bien connus de la famille Ford, dont certains ont été invités au mariage de sa fille.
Ce dernier aurait acheté des terrains dans cette réserve environnementale juste avant que la province ne se rende à la déréglementation, ce qui a déclenché une enquête pour la corruption par la police provinciale, qui a ensuite transféré ses dossiers à la GRC.
Cependant, toutes ces bévues ne semblent pas s’en tenir au Premier ministre Téflon, cependant, c’est Doug Ford.
Le Premier ministre sortant a également bénéficié d’un changement dans la coalition progressiste-conservatrice, qui a fait des percées sur le côté gauche de l’échecteur politique, dans des bastions traditionnellement néo-démocratiques. Les premières tentatives de séduire le collier bleu, à la fois dans les villes et dans les zones rurales, ont été faites lors du dernier mandat. Et ils portent maintenant des fruits. Les promesses importantes de soutien aux travailleurs dans les secteurs névralgiques de l’économie en cas de guerre commerciale – l’automobile et l’acier en premier lieu ont consolidé ce transfert vers les conservateurs progressistes, dont l’ampleur sera mesurée dans les prochains jours (en particulier autour de Hamilton, Windsor et Sudbury).
Le couronnement de Marit Stiles par les néo-démocrates en 2022 peut également avoir des effets négatifs sur son parti, privés de la visibilité d’une race de leadership. Au-delà du Grand Toronto, il reste largement inconnu. Ses deux années en tant que chef d’opposition officiel ne lui ont pas permis d’étendre sa base, qui a des répercussions dans les régions où elle compte historiquement pour le NPD.
Doug Ford quitte cette troisième campagne électorale encore plus forte que la dissolution de la chambre. Son parti peut même atteindre une centaine de députés, sur 124 sièges possibles. Un résultat brillant … mais qui pourrait provoquer des maux de tête au Premier ministre. Gérer un grand caucus n’est jamais facile – François Legault pourrait témoigner.
L’autre défi qui frappera Firster ou plus tard à la porte du Premier ministre sera le résultat de cette enquête de la GRC sur l’affaire Green Belt. Nous attendons un rapport potentiellement explosif qui pourrait remettre en question les proches du Premier ministre, sinon Doug Ford lui-même. Mais même si des accusations ont été portées, ce dernier aura assuré à son parti une majorité inébranlable à la tête de la province pendant les quatre prochaines années: en ce sens, il a gagné de manièrets le pari lancé fin janvier.