L’auteur est un médecin vétérinaire et éthicien. Ex-président de l’Ordre des médecins vétérinaires de Québec, elle travaille à Groupe de recherche en épidémiologie des zoonoses et de la santé publiqueOffre une formation et intervient régulièrement sur les relations humaines-animales et l’approche “One Health”.
Beaucoup de chats qui marchent dans les rues et les ruelles n’ont pas de famille. Il y aurait 1,4 à 4,2 millions au Canada, selon les dernières estimations du gouvernement fédéral, qui remonte à une douzaine d’années. C’est également le chiffre sur lequel l’Association canadienne de médecins vétérinaires est basée sur sa position sur la question. Il est important de savoir que ces estimations sont très approximatives, car il y a un manque de données sur le sujet.
Parmi ces chats errants, certains ont été abandonnés et laissés dans la rue, tandis que d’autres sont nés de parents sans propriétaire (nous parlons ensuite de chats ennuyeux, c’est-à-dire retourné dans la nature).
À titre de comparaison, selon les mêmes sources, il y a environ 8,5 millions de chats familiaux au Canada, dont une partie (peut-être 70%) a un accès extérieur.
Voici les principaux problèmes causés par cette population de chats errants et les différentes solutions pour essayer de mieux la contenir.
Porteurs de maladies et de prédateurs
Les chats peuvent être des réservoirs et des vecteurs de diverses maladies, dont certaines sont transmises aux humains (zoonoses), la toxoplasmose la plus connue. Mais il y en a plusieurs autres, dont les plus fréquents sont parasites ou bactériens. Récemment, la grippe aviaire hautement pathogène (IAHP), communément appelée grippe aviaire, a été ajoutée à la liste. Ce virus circulant actuellement dans les troupeaux laitiers (aux États-Unis) et de volaille (mondiale) peut infecter les chats. L’infection peut être transmise lorsqu’un chat boit du lait cru de vaches infectées, et celles de la chasse (donc tous les chats errants) sont également exposés, car ils peuvent être en contact avec des souris infectées et des oiseaux. Nous ne savons pas encore tout sur les possibilités de transmission pour l’homme par la suite, mais les chercheurs étudient la question.
En plus des agents infectieux circulants, les chats sont de formidables chasseurs. On estime qu’ils provoquent des ravages importants dans plusieurs espèces animales. Au Canada, les chats libres tueraient 100 à 350 millions d’oiseaux par an, selon les travaux du gouvernement fédéral mentionnés ci-dessus. Les chats de famille à l’extérieur sont en partie responsables de la mort de ces oiseaux, mais ce sont les chats sauvages qui tuent probablement la majorité, disent les chercheurs.
Ce sont les Européens qui sont responsables de l’introduction des espèces en Amérique du Nord, dans le XVIIe siècle. Aujourd’hui, les humains portent également une grande responsabilité dans l’augmentation de la population de chats errants. D’une part par l’abandon des chats, mais aussi en laissant échapper les chats non stérilisés, qui contribuent à l’augmentation de la population féline. Il y a beaucoup de gens qui nourrissent des chats errants, ce qui amplifie également le problème. En les nourrissant, nous les attirons, nous répondons à leurs besoins et ils se multiplions encore plus! Les chats errants ne doivent pas être nourris, à moins qu’ils ne fassent partie d’une colonie et dans le cadre d’un programme, comme je l’explique ci-dessous.
L’ancienne approche: l’euthanasie
L’approche traditionnelle des chats errants était de les capturer et de les euthanasier. Mais cette façon d’intervenir pour réduire la population et les nuisances est inefficace. Même sur une île, cela nécessite de nombreuses années d’euthanasie massive avant que la population ne sorte. Lorsque le territoire d’intervention n’est pas une île, la population revient rapidement au même niveau. L’explication est simple: les chats peuvent arriver de territoires voisins, d’autres peuvent être abandonnés et des chats de famille non stérilisés contribuent au surpopulation. Ce type d’intervention ne pourrait être efficace que si vous empêchiez une nouvelle entrée de chat, ce qui s’avère impossible.
Ce n’est pas seulement l’inefficacité des programmes d’euthanasie qui leur ont fait perdre la popularité: les mentalités ont changé. Les personnes qui travaillent dans les services aux animaux et les abris souhaitent intervenir de manière plus humaine. Les élus et les responsables municipaux veulent également montrer à leur population qu’ils ont abandonné ces anciennes façons de faire les choses. Le public est en effet préoccupé par le bien-être de ces animaux exposés aux caprices de la vie dans la liberté: mauvais temps, accidents et maladies infectieuses.
Une solution: favoriser la stérilisation
Au cours des dernières décennies, certaines municipalités ont adopté des programmes de capture, de stérilisation, de libération et d’entretien (CSRM) des colonies de chat. Nous utilisons des citoyens pour capturer des animaux, nous les stérilissons, puis nous les libérons. Par la suite, nous nous assurons qu’ils vivent dans des conditions décentes et nous les nourrissons. L’objectif est de réduire la reproduction et la population féline sans effectuer une euthanasie massive. Ce type de programme peut être efficace pour éliminer pleinement une population féline si elle est rigoureusement appliquée sur un territoire fermé. Le chat a une longévité limitée et, étant stérilisé, il ne se reproduit pas, ce qui conduit à l’extinction de la population. En fait, nos territoires ne sont pas fermés et nous n’avons pas les moyens d’intervenir de manière assez massive pour vraiment réduire la population à long terme.
L’une des solutions pour favoriser l’amélioration de l’efficacité des programmes CSRM: la stérilisation de tous les chats de famille qui sortent, sans aucune exception. Cela éviterait que ces animaux contribuent à la surpopulation en donnant naissance à des stress indésirables, y compris plusieurs chats susceptibles de se retrouver errant. Certaines villes, comme le Québec, ont rendu la stérilisation des chats obligatoire, mais ces initiatives ont un succès modéré, faute de moyens pour faire respecter les réglementations. En ce moment dans la province, il a encore du mal à enregistrer tous les chats (en leur faisant porter une médaille). S’ils ne sont pas identifiés, il est très difficile d’assurer leur stérilisation …
Ensuite, la deuxième solution consiste à capturer et à adopter autant de chats que possible, c’est-à-dire suffisamment sociable pour vivre éventuellement dans une famille et prospérer là-bas. Il s’agit déjà de partout au Québec. Cependant, vous devez rester réaliste: il y a une limite au nombre de chats qui peuvent être adoptés. De nombreux chats ne sont pas sociables et seraient malheureux dans une maison. Et même autrement, nous ne pouvons pas oublier qu’un animal a besoin de temps et d’argent des adoptants, même lorsque le refuge s’occupe de la stérilisation et des premiers vaccins. Les adoptants devront payer pour la nourriture, la litière, les vaccins futurs et les soins en cas de maladie.
Des programmes CSRM étendus et intensifs sont donc également nécessaires pour stabiliser la population. Cependant, une certaine euthanasie est inévitable parce que les chats errants sont plus souvent malades et blessés que ceux qui ont un propriétaire.
Certes, le débat social sur la question des chats errants est loin d’être terminé.
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