Un collectif de linguistes français s’est amusé avec la langue le mois dernier avec le tout premier “forage”. Ce néologisme décrit une forme renouvelée de dictée qui vise à ne pas corriger les participants, mais à illustrer les évolutions de la langue.
Cet exercice ludique, qui s’est tenu à Paris au Mundolingua Museum of Languages, visait à comparer l’orthographe actuelle avec celle des textes de Montaigne et Molière, entre autres documents.
Dication ne dicte rien, comme l’explique un membre du collectif, Christophe Benzitoun, linguiste et professeur à l’Université de Lorraine. Dans ce cas, il est possible de réaliser soit en présentant un texte original d’un grand auteur que les participants peuvent alors corriger en français contemporain, soit en étant dicté dans le texte en français contemporain qui sera corrigé selon l’original. En d’autres termes, nous pouvons corriger Montaigne ou Molière … ou être corrigés par eux.
Considérer par exemple l’extrait choisi tiré de Essai De Montaigne publié en 1598:
Dans l’orthographe contemporaine, cela donnerait ceci:
«J’ai vu des histoires très agréables devenir très ennuyeuses dans la bouche d’un Seigneur: chacune des aides ayant été arrosée cent fois. Deuxièmement, qu’il se souvient de moi moins les infractions reçues, comme cet ancien l’a dit; j’aurais besoin d’un protocole, comme Darius […] »»
La différence est évidente. Il existe deux types de S, dont un qui a été écrit ſ. D’un autre côté, nous n’avons pas très clairement distingué le V du U, ni le i de J. Nous pouvons passer longtemps ici sur les 2 B et les deux L de “arrosé” et du “protocole”, ou la combinaison de “dire” et “dire” (disons, devrait). L’absence virtuelle d’accents familiers (circonflexe, sérieux, aiguë) est également frappante. Et comme le Cedille n’existe pas, “reçu” est écrit “reçoit” – la convention du temps a placé un e après le C pour agir en tant que Cedille (nous disons reçus, pas reku).
Selon Christophe Benzitoun, l’idée est de susciter la réflexion et la discussion entre les participants. Les enseignants qui souhaitent reprendre la dictée ont accès au kit complet et commenté, offert gratuitement en ligne et qui sera mis à jour périodiquement.
Langue de Molière
Deux ou trois générations après Montaigne, Molière a pris le stylo. Ah, Molière et sa langue! Précisément, le deuxième extrait du forage est tiré de sa chambre Escole des femmes (pardon, L’école des femmes), Acte III, scène 1, dans l’édition de 1663.
En français contemporain, il peut être lu comme:
“Mais encore une fois, grâce aux soins pris,
Vous avez sorti l’honnêteté.
L’air dont je vous ai vu jeter cette pierre pour lui,
Qui de tous ses créations a mis de l’espoir sur le terrain,
me confirme encore mieux pour ne pas différer
Le mariage, où je dis que vous devez vous préparer. »»
L’original montre des conventions qui sont encore très proches de celles de Montaigne:
Ici, les accents ont progressé, mais pas universel (préparer, diffèrent). Le circonflexe est lent – “merci” au lieu de “Grace”. Nous remarquons que “Wedding” a écrit “Nopces” pour se conformer au latin “Noptiae”, mais nous sommes toujours “Ay Veu” pour “ai vu”. De plus, ce participe passé n’est pas encore d’accord avec son objet direct encore placé devant (“vous” pour le caractère d’Agnès).
Cette façon d’écrire sera toujours les mêmes 31 ans plus tard lorsque l’Académie française publiera la première édition de son dictionnaire. Je vous épargne cet extrait et plusieurs autres, parce que vous comprendrez: l’orthographe contemporaine est certainement une évolution par rapport aux anciens, mais elle n’a pas évolué non plus. Et c’est tout le problème, selon Christophe Benzitoun.
Pourquoi dicty
Le collectif a imaginé le néologisme “dictée” pour créer une solution de remplacement amusante pour les dictations Sauce Bernard Pivot, dit-il. Le linguiste est l’auteur d’un livre très intéressant dont j’ai déjà parlé. Qui veut la peau du français? dénoncé l’état de la schizophrénie généralisée des locuteurs déchirés entre un langage oral très simple et très clair, et un langage de grande taille dont la norme évolue seulement la vitesse géologique, c’est-à-dire très, très lentement.
Il serait faux de prétendre que la norme était complètement immobile: le “français contemporain” dans lequel nous enseignons Molière et tous les classiques datent de 1835. Cette norme marque une évolution considérable par rapport au vrai français de Molière. Le problème est que, en plus de la réforme des rectifications orthographiques de 1990, les mises à jour sont rares depuis deux siècles.
Cependant, cette idée avance. Dication offre, pour chaque exemple, une version des mêmes textes selon certains modèles de réforme existants. Par exemple, selon le modèle duOrtografe Rationèle Développé il y a environ quinze ans, la première phrase de Montaigne se lirait: “J’ai vu des histoires très agréables s’ennuyer dans la bouche d’un Seigneur.” “
Malheureusement, explique Christophe Benzitoun, la langue ne s’est jamais libérée d’un certain conservatisme. Au moment de Molière, le grand débat était de savoir si l’orthographe devait être étymologique (donc basée sur l’histoire du mot) ou se conformer à la prononciation. Pour son premier dictionnaire publié en 1694, l’Académie a pris le côté étymologique. Cependant, il y a 14 ans, le lexicographe Pierre Richelett avait publié un grand dictionnaire qui est sorti de la tradition étymologique: il a écrit “Afare, Boutem” au lieu de “l’affaire, le baptême”. “Il a également opté pour” avocat, tisane “tandis que l’académie a longtemps maintenu” Advocate, Ptisane “. En fait, linguistiquement, les choix de l’Académie représentaient une régression concernant l’utilisation”, explique Benzitoun.
En fait, le forage veut transmettre l’idée que notre orthographe contemporaine n’est pas absolue ou inévitable, mais un bricolage du choix des conventions que nous avons oublié de mettre à jour.
Le collectif auquel Christophe Benzitoun appartient à une véritable modernisation de la langue, un sujet dont j’ai souvent parlé et auquel j’adhère fortement.
«L’effet d’une orthographe qui n’évolue pas est que trop de gens se sentent illégitimes pour écrire dans leur langue. Je vois un très gros problème avec la diffusion des Français, et même pour la maintenance. Je veux que les Français soient une belle langue, mais cela n’a pas besoin d’être difficile à être insérément inséré.