À l’offensive
L’artillerie et les armes nucléaires de la Corée du Nord ne sont pas les seules menaces qui pèsent sur la Corée du Sud. Il y a aussi les moustiques. Depuis août, les autorités sud-coréennes ont intensifié leur traque de ces insectes, notamment en utilisant des dispositifs de capture le long de la DMZ, la zone démilitarisée qui longe la frontière entre les deux Corées. Ils fonctionnent en émettant des substances naturellement présentes sur la peau humaine, ou dioxyde de carbone, pour attirer les insectes. Le paludisme reste endémique en Corée du Nord, avec 4 500 cas recensés entre 2021 et 2022, selon l’OMS. Le manque de moyens empêcherait Pyongyang de s’attaquer à ce fléau transmis par les moustiques de la région. Anophèle genre, qui peut parcourir jusqu’à 12 kilomètres et qui prolifère en raison du réchauffement climatique.
Victimes collatérales
Dans un article de la revue Histoire sociale de la médecine (Mai 2016), Kim Jeong-ran, de l’université d’Oxford, rappelait que « le paludisme était répandu dans une grande partie de la péninsule ». Le programme sud-coréen de lutte contre la maladie remonte à 1959. Les moyens déployés ont donné des résultats spectaculaires et, en 1979, l’OMS a reconnu l’éradication du paludisme en Corée du Sud. Il est réapparu à Paju, une ville du nord de la Corée du Sud, lorsqu’un militaire l’a contracté en 1993. 4 000 cas ont été recensés en 2000. De nouvelles mesures ont réduit ce nombre à quelques centaines par an, mais entre 2022 et 2023, il a bondi de près de 80 %, passant de 420 à 747. Et la situation s’aggrave. En juillet 2024, 70 cas ont été recensés.
Base arrière
En raison du manque de coopération entre le Nord et le Sud, « il n’est pas possible de combattre les parasites dans la DMZ », déplore Kim Dong-gun, biologiste à l’université Sahmyook. Créée en 1953, à la fin de la guerre de Corée, cette bande de terre de 4 kilomètres de large, vierge de toute présence humaine, sépare les deux Corées sur 250 kilomètres d’est en ouest. Des marais de l’embouchure du fleuve Han sur la mer Jaune à l’ouest aux reliefs montagneux à l’est, cette zone comprend 90 000 hectares de paysages variés. Un millier de plantes, 650 espèces de vertébrés, reptiles et amphibiens et 52 espèces de mammifères y survivent. Ces « animaux servent de source de sang aux moustiques pour pondre leurs œufs », explique Kim Hyun-woo, de l’Agence sud-coréenne de contrôle et de prévention des maladies.
Première ligne
Face à la hausse du nombre de cas de paludisme, Séoul a lancé cette année une alerte nationale, appelant à intensifier le réseau de capture et de surveillance des moustiques mis en place dans les années 1990. Au nord-ouest de la province du Gyeonggi, Paju est en première ligne de ce combat. La ville, séparée des municipalités nord-coréennes de Jangpung et Kaesong par la DMZ, abrite le village de Panmunjeom, où fut signé l’armistice de la guerre de Corée. Considérée comme partie intégrante de la « ligne de front de la guerre froide », elle a été transformée en ville de garnison, et la liberté de mouvement de ses habitants a été fortement restreinte. Lorsque les tensions se sont apaisées dans la péninsule dans les années 2000, la région a connu une croissance économique rapide.