Les données recueillies par l’association Santé Avenir Environnement révèlent des traces inquiétantes de certains pesticides chez les enfants vivant à proximité des parcelles agricoles autour de La Rochelle. Une région où une augmentation des cancers pédiatriques a été observée.
“Nous voulions savoir si nos enfants pouvaient être imprégnés de ces molécules.” Des traces de pesticides, dont certains sont interdits, ont été retrouvées dans les cheveux et les urines de dizaines d’enfants, vivant à proximité de parcelles agricoles autour de La Rochelle, selon des analyses dévoilées samedi 12 octobre par une association de lutte contre les cancers pédiatriques.
A l’occasion de l’Appel de La Rochelle, une marche organisée pour réclamer un « plan de sortie des pesticides de synthèse », l’association Santé Avenir Environnement, créée en 2018 après le décès d’un adolescent, a publié les données recueillies sur 72 enfants âgés de 3 à 17 ans. habitant six communes de la plaine de l’Aunis.
« Un impact massif des pesticides sur l’environnement »
“Nous voulions une photographie de l’imprégnation des enfants avec de multiples substances”, a expliqué à l’AFP Laurence Huc, directrice scientifique à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae). et l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), qui a réalisé l’analyse.
“Nous avons constaté un impact massif des pesticides sur l’environnement”, déclare Franck Rinchet-Girollet, président de l’association Santé Avenir Environnement, à BFMTV.
Quatorze molécules différentes ont été détectées dans les urines, avec une moyenne de 1,8 (molécules, NDLR) par enfant – jusqu’à six pour un.
Les produits les plus fréquemment retrouvés sont le pentachlorophénol (PCP), un insecticide présent dans l’organisme de près d’un enfant sur deux, et deux fongicides : le propamocarbe, retrouvé chez 25 enfants (34,7% du panel) et le phényl-2-phénol, détecté chez le corps de 19 enfants (26,4%).
Dans les cheveux, 45 substances ont été retrouvées, soit 4,4 par enfant en moyenne. Le plus touché était dix. La molécule la plus présente est un insecticide, le DEET (86,1% du panel). Suivi du butoxyde de pipéronyle, d’un adjuvant (77,8 %) et d’un fongicide, l’azoxystrobine (33,3 %).
Les néonicotinoïdes, qui ont des conséquences sur le développement neurologique, ont été retrouvés à des taux élevés chez 11 enfants, “alors qu’ils sont interdits depuis 2013 et 2018”, rappelle le scientifique. « Plus ils habitent près des champs, plus les tarifs sont élevés », souligne-t-elle.
De l’atrazine, un herbicide interdit depuis 2004, possiblement perturbateur endocrinien et neurotoxique, et de la dieldrine, un insecticide interdit depuis les années 1970 et très persistant dans l’environnement, ont également été retrouvées, ainsi que d’autres produits cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques. comme la pendiméthaline ou le phtalimide. Autant de substances « qu’on ne devrait pas avoir dans l’organisme », insiste Laurence Huc.
Un lien avec les cancers pédiatriques ?
Dans la plaine de l’Aunis, 15 cas de cancers pédiatriques ont été enregistrés depuis 2008, entraînant deux décès, selon Santé Avenir Environnement.
“On ne fait pas de lien direct entre pesticides et cancers pédiatriques mais on dit que la qualité des molécules que l’on trouve et la dangerosité de certaines peuvent contribuer à un cocktail nocif pour la santé”, explique Franck Rinchet-Girollet pour BFMTV, dont le fils de sept ans est en rémission.
“Il existe des pesticides interdits. Leur présence peut s’expliquer de différentes manières : on en retrouve par effet résiduel, car ils sont persistants. Nous avons d’autres molécules qui nous inquiètent puisque certaines ont une durée de vie très courte. Et on les retrouve encore dans les urines. des enfants », ajoute-t-il, demandant « une enquête des pouvoirs publics ».
Au micro de BFMTV, Nathalie, maman de Pauline, décédée d’un cancer à 15 ans, vit à Saint-Rogatien, une commune proche de La Rochelle, bordée de fermes. « Nous voulons savoir pourquoi les enfants tombent malades, ont le cancer et nous ne faisons rien ? C’est nous, parents d’enfants malades, qui nous battons pour le faire savoir”, s’insurge-t-elle.
« Beaucoup d’enfants tombent malades et nous n’en parlons pas assez. C’est injuste, inacceptable, intolérable (…) On se pose la question, on est vraiment très inquiets”, critique-t-elle.
De son côté, sur notre antenne, Frédéric Maynard, céréalier en Haute-Garonne, assure qu’il est impossible pour les agriculteurs d’utiliser des produits interdits en France. « Nous sommes trop contrôlés pour cela », dit-il.