Les Sud-Coréens sont descendus dans la rue mercredi 4 décembre, en colère contre un homme : le président Yoon Suk Yeol, dont le coup d’État avorté pour tenter d’imposer la loi martiale dans le pays a choqué les citoyens de cette jeune démocratie. Les rues de la capitale Séoul ont été envahies par des milliers de manifestants et de policiers, tandis que les syndicats appelaient à une grève générale et que l’opposition exigeait la démission du président, l’accusant de rébellion.
Avec des banderoles appelant à la destitution du président, des bougies et une distribution de boissons chaudes, les Coréens ont marché vers le palais présidentiel, montrant leur profond choc, alors que l’opposition déposait une motion de destitution au Parlement contre l’ancien procureur général du pays.
Cette motion, qui nécessitera une majorité des deux tiers pour être adoptée, pourrait être soumise au vote vendredi, ont indiqué les six partis d’opposition représentés au Parlement, dont le principal, le Parti démocrate (centre gauche).
M. Yoon, dont la cote de popularité était déjà au plus bas, est dos au mur tant par l’opposition que par son propre parti après avoir introduit la loi martiale lors d’un discours surprise mardi soir, avant d’abroger la mesure quelques heures plus tard en vertu de la loi. pression des députés et de la rue.
Dans le contexte de l’adoption difficile du budget 2025, le président a justifié ce coup de force en affirmant vouloir « éliminer les éléments hostiles à l’État » Et « protéger la Corée du Sud libérale des menaces posées par les forces communistes nord-coréennes ».
M. Yoon, élu de justesse en 2022 et qui n’a jamais obtenu de majorité au Parlement, avait pointé du doigt un « dictature législative » et accuse les élus de l’opposition de bloquer « tous les budgets indispensables aux fonctions premières de la nation ».
Tourner le dos à près de quarante ans de démocratie
Après l’annonce de M. Yoon, des troupes ont été déployées et des hélicoptères de l’armée ont atterri sur le toit du Parlement coréen, mais les législateurs ont pu se réunir en toute hâte pour adopter une résolution exigeant l’abrogation de la mesure. Au total, plus de 280 soldats ont fait irruption au Parlement, selon l’agence de presse Yonhap. Au total, 190 députés sur 300 ont quand même réussi à se rassembler dans l’hémicycle, où des soldats des forces spéciales tentaient de pénétrer. Ils ont réussi à voter à l’unanimité une motion appelant à la levée de la loi martiale.
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L’imposition de la loi martiale a entraîné la suspension de la vie politique, la fermeture du Parlement et la mise sous contrôle des médias.
En début de soirée de mercredi, le chef de l’Etat n’était toujours pas réapparu en public et certains manifestants se disaient choqués d’avoir vu leur pays si près de tourner le dos à près de quarante ans de démocratie.
« Grève générale illimitée » jusqu’à la démission de M. Yoon
Le chef de l’opposition Lee Jae-myung, qui a perdu de peu l’élection présidentielle face à M. Yoon, a qualifié cette décision de“illégal”. « Nous allons porter plainte pour rébellion » contre le président, ses ministres de la Défense et de l’Intérieur et « des personnalités clés de l’armée et de la police, comme le commandant de la loi martiale et le chef de la police »a annoncé mercredi le Parti démocrate.
Le ministre de la Défense Kim Yong-hyun a annoncé qu’il avait présenté sa démission au président. “Je regrette profondément et assume l’entière responsabilité de la confusion et de l’inquiétude causées au public par la loi martiale”il a écrit dans un communiqué de presse. Même le parti de M. Yoon, le Parti du pouvoir populaire, s’est distancié de l’initiative du président.
La Confédération coréenne des syndicats, la plus grande organisation intersyndicale du pays avec quelque 1,2 million de membres, a appelé à une « Grève générale illimitée » jusqu’à ce que M. Yoon démissionne, estimant qu’il avait « a signé sa propre fin du pouvoir ».
La levée de la loi martiale en Corée du Sud montre “engagement” du pays vers l’État de droit, a déclaré mardi le secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte. “Je pense que l’annonce de la fin de la loi martiale indique l’engagement continu de la Corée du Sud en faveur de l’État de droit”a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse à Bruxelles. Le président Yoon Suk Yeol a instauré la loi martiale mardi soir, avant d’abroger cette mesure à peine six heures plus tard sous la pression des députés et de la rue.