Ce texte rassemble les capsules contenues dans notre newsletter politique, publiée le jeudi à 17h00. Vous y trouverez un regard en quatre points sur les événements politiques de la semaine. Vous pouvez vous inscrire ici.
On dit souvent qu’il faut lire les notes de bas de page pour ne rien manquer dans un document. Hier en a fourni une nouvelle preuve, avec cette dissension spectaculaire en Alberta à l’issue d’une réunion où le gouvernement fédéral et les provinces tentaient de se mettre au diapason des menaces de Donald Trump. En italique, à la fin du long communiqué publié, on peut lire que «le gouvernement de l’Alberta n’a pas approuvé la déclaration conjointe entre le gouvernement du Canada et le Conseil de la fédération».
La première ministre Danielle Smith a expliqué sur les réseaux sociaux que tant que la proposition de suspendre les exportations de pétrole faisait partie de la réponse potentielle du Canada, l’Alberta ne pourrait « pas soutenir pleinement le plan fédéral ». C’est un très gros bémol au succès de la réunion de mercredi. Mais cela a néanmoins permis de recentrer le message canadien. Le refus de l’Alberta d’adhérer au plan stratégique empêche peut-être de parler d’unanimité canadienne, mais nous avons quand même pu dégager dans la journée un très large consensus (neuf provinces, deux territoires et le gouvernement fédéral) autour des grandes lignes discutées publiquement. Il existe aujourd’hui quelque chose qui ressemble à un front commun canadien, ce qui n’était pas acquis d’avance.
Les représailles précises que le Canada envisage si des tarifs sont imposés restent secrètes. Ottawa et les provinces ne veulent pas ouvrir le jeu avant de savoir ce que fera réellement l’administration Trump. Mais le message envoyé mercredi était quand même clair : « tout est sur la table ». Et tout le monde (sauf Danielle Smith, bien sûr) est d’accord avec l’idée qu’il ne faut pas exclure que cela affecte les exportations d’énergie (pétrole, gaz naturel, hydroélectricité) ou de minéraux critiques. Le principal rapport de force du Canada face aux États-Unis de Donald Trump est là : écarter dès le départ ce levier de négociation accentuerait la position de faiblesse du pays face au géant américain, tous les premiers ministres l’ont bien compris. Danielle Smith le sait aussi, mais elle défend avant tout sa province, ce que son homologue ontarien Doug Ford a vivement critiqué.
À quelques jours de l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, toute la classe politique canadienne retient son souffle. Si le président américain met sa menace à exécution, des effets dévastateurs sont attendus sur l’économie canadienne, dont près de 500 000 pertes d’emplois rien qu’en Ontario. Et si “tout est sur la table” à ce stade, c’est parce que tout est possible de l’autre côté : d’où l’importance d’envisager des représailles très dissuasives – et de parvenir à convaincre Danielle Smith de porter elle aussi la casquette que portait Doug Ford. mercredi et qui dit que « le Canada n’est pas à vendre »…
Le numéro
26 000
L’année dernière, il y a eu au total 26 000 «passages illégaux» de la frontière américaine en provenance du Canada, a indiqué mardi le ministre québécois de la Sécurité publique, François Bonnardel. De ce nombre, 19 000 ont été réalisés dans ce qu’on appelle le secteur Swanton, entre Cornwall (Ontario) et Sherbrooke. Est-ce beaucoup ? En chiffres absolus, c’est discutable. Par rapport à 2022 (1 000 passages), la hausse est spectaculaire. Mais dire que cela représente une « invasion des États-Unis », comme le prétend Donald Trump pour alimenter sa rhétorique menaçant le Canada de tarifs douaniers, il y a une ou deux marges. Les interceptions liées aux passages irréguliers à la frontière avec le Mexique se comptent en millions chaque année.
Le baromêtre
👍 Soulèvement
Il y a un an, le Parti libéral du Québec n’espérait pas grand-chose : voir quatre candidats sur la ligne de départ de la course à la direction. Sans oublier que ceux qui pourraient découvrir tardivement un intérêt pour le poste disposent encore de trois mois pour remplir les conditions d’éligibilité. C’est déjà, pour le PLQ, une petite victoire – la preuve que le parti peut susciter l’intérêt, et la (presque) garantie que la course à la chefferie provoquera un débat d’idées, ce qui n’avait pas été le cas en 2020. Notons que le jour 1, Pablo Rodriguez et Charles Milliard sont repartis avec quelques longueurs d’avance sur Denis Coderre (qui devra régler ses problèmes avec le fisc avant de se qualifier officiellement) et l’avocat fiscaliste Marc Bélanger. Question d’organisation, de support, de résonance. Mais il faut aussi noter que plusieurs courses à la direction ont donné lieu à des résultats surprenants dans le passé.
👎 En déclin
Dès le départ, le mandat de la nouvelle agence Santé Québec s’annonçait dur, dans un contexte de pressions multiples sur un réseau qui n’était pas entièrement en bonne santé. Ensuite, lancer cette structure en lui demandant immédiatement de débloquer 1,5 milliard d’économies n’allait certainement pas faciliter le travail… et c’est un peu ce qu’on a vu cette semaine, avec différents rapports évoquant la disparition de plus d’un millier de postes. (sur près de 350 000, tout de même) depuis novembre et l’élimination prévue d’environ 500 autres d’ici fin janvier. Une suppression d’emplois n’est pas en soi négative : tant le ministre que Santé Québec soutiennent qu’il fallait éliminer des postes de jour pendant la semaine pour ensuite ouvrir d’autres postes le soir, la nuit et la fin de semaine. Il y a donc une part de réorganisation dans l’opération. Très bien. Mais Christian Dubé le dit lui-même : la mission de trouver 1,5 milliard sans nuire aux services à la population sera « difficile ». Le mot semble faible et les partis d’opposition doutent fortement que cela soit possible. Le ministre doit croiser les doigts pour que les nouveaux gestionnaires de réseaux soient aussi bons qu’il l’a dit lors de leur présentation.