L’auteur est professeur de sciences politiques au Royal Military College et à l’Université Queen’s à Kingston en Ontario. La recherche de ce spécialiste des politiques canadien se concentre sur les langues officielles, le fédéralisme et la politique judiciaire.
La guerre tarifaire, si elle s’est naturellement imposée comme “la question de l’urne” de la campagne électorale, a également soulevé une impressionnante vague patriotique canadienne – forçant soudainement les chefs de parti (à l’exception du bloc, pour des raisons évidentes) à jouer des coudes pour se définir comme le meilleur représentant de l’identité canadienne.
Un exercice périlleux, comme en témoignent les premiers jours de la campagne. Mark Carney, qui a déjà été critiqué pour être plus présent dans les médias américains que dans les médias canadiens lors de la course à la chefferie libérale, a voulu faire une impression au cours de sa première semaine de Premier ministre. Il a notamment joué la carte symbolique des “trois peuples fondateurs” dans son premier discours et dans ses visites d’État à l’étranger et à Iqaluit, où il a été cordialement reçu par le Premier ministre du Nunavut, PJ Akeagok.
Cependant, le début de sa campagne a été marqué par plusieurs camping-cars. Son français parfois approximatif l’a forcé à passer à l’anglais à quelques reprises devant les journalistes. Il a également embarrassé lors de la présentation de son candidat vedette dans le district de Châteauguay-les Jardins-de-Napierville, le fondateur de Polysseve, Nathalie Provost. Il y a aussi un pari sûr que cette faiblesse personnelle a quelque chose à voir avec la décision du Parti libéral de refuser l’invitation à Face à face de la TVA, bien que M. Carney ait justifié sa décision par l’absence d’Elizabeth May (alors que c’était le co-chef francophone, Jonathan Pedneault, qui aurait été également invité).
Cependant, le tir le plus dur apporté à son statut de «défenseur du Canada», à tout le moins en dehors du Canada francophone, est peut-être la révélation qu’il aurait placé des investissements dans un paradis fiscal-bermuda quand il a travaillé à Brookfield, évitant ainsi les clients canadiens de payer des impôts utilisés pour garnir des coffres publics … dont il est maintenant le directeur.
Pierre Hairyvre et son équipe savaient rapidement comment profiter de leur avantage stratégique-MR. Poilievre est probablement le chef conservateur qui a la meilleure maîtrise du français depuis Brian Mulroney à des points de score en ce qui concerne leur principal adversaire sur la question linguistique, mais ils vont également plus loin dans leur tentative de séduire l’électorat de Québec.
Le financement du troisième lien, la protection de la gestion de l’offre pour les produits laitiers et le respect de l’autonomie du Québec, en particulier en termes d’immigration, constituent les promesses de la “plateforme québécoise” présentée par l’équipe conservatrice cette semaine, qui est basée sur un fédéralisme de soi-disant “responsable”. Certains défis, tels que la livraison sur les rails du projet GNL Québec (qui pourraient aller à l’encontre de la volonté du gouvernement du Québec, ce projet ayant été refusé par le Bape en 2021, car il est jugé trop risqué par rapport aux avantages qu’il générerait), mais l’ombre de ce positionnement.
Le désir de longue date de M. Hairy de définir le réseau CBC tout en maintenant la radio-canadade devient également plus problématique dans le contexte actuel. Elle invite les comparaisons avec la promesse de Donald Trump d’abolir la chaîne publique NPR-To ne rien dire sur l’effet potentiellement dévastateur de la mise en œuvre de cette politique sur la radio-canadade en dehors du Québec, où les services occupent souvent les mêmes locaux que ceux de la CBC.
Enfin, le passage de M. Hairy vers Iqaluit pour annoncer le financement d’une nouvelle base militaire dans le nord du nord en ponçant l’Aide internationale canadienne (une autre couche d’une décision de nos voisins du Sud, ce qui a suivi quelques jours, l’abolition de l’agence de l’USAID par Donald Trump), en février dernier, a également été marquée par un point fantôme. Au lendemain de cette visite, le Premier ministre Akeagok a rappelé à Pierre Hairy que “les décisions concernant le Nord ne pouvaient pas être prises sans une contribution significative des personnes qui y vivent”. Une réplique qui peut suggérer des difficultés à trouver entre les peuples autochtones et le chef conservateur, qui a également été critiqué par les derniers mois du passé pour son approche du développement des ressources dans leurs territoires.
Enfin, pour le New Democratic Party (NPD), les problèmes affectant les classes sociales – en particulier le soutien de la classe ouvrière – ont historiquement pris la priorité sur l’identité ou les problèmes linguistiques. Le tournant urbain du parti, déjà a commencé avec Jack Layton, mais maintenant entièrement supposé sous la direction de Jagmeet Singh, a cependant fait grimper son électorat unioniste traditionnel. L’ensemble du NPD au Québec, grâce au “Good Jack”, est également maintenant du passé, la fête ne détenant que 1 siège sur 78.
Alors que l’opération de séduction conservatrice envers les passes bleues du pays, lancées par Erin O’Toole et nourries par le slogan “Bottes, pas les liens”, semble avoir réussi et que les agglomérations urbaines font un retour en masse dans le pli libéral selon les sondeurs, ce n’est rien de moins que l’avenir du parti qui est au prochain ballon, les intentions de vote de 10%.
Comme les menaces de tarification n’ont pas eu d’effets uniquement sur les promesses économiques des parties pendant la campagne.