Pendant plusieurs jours, elle a essuyé critiques et polémiques pour finalement achever son parcours olympique portée en triomphe dans un stade Roland-Garros en fête et totalement acquis à sa cause. La boxeuse algérienne Imane Khelif a remporté la médaille d’or dans la catégorie des moins de 66 kg, vendredi 9 août au soir. En finale, elle a vaincu aux points la Chinoise Yang Liu, championne du monde en titre, à l’unanimité des juges. Imane Khelif, 25 ans, apporte à l’Algérie son deuxième titre des JO de Paris après l’or de Kaylia Nemour en gymnastique.
“Je suis très heureux”a réagi Imane Khelif après son succès. « J’ai rêvé de cela pendant huit ans et maintenant je suis médaillée d’or. J’ai travaillé, je n’ai pas dormi, j’étais fatiguée pendant huit ans. Maintenant, je suis championne olympique ! »
« Je suis une femme forte avec des pouvoirs spéciaux. Depuis le ring, j’ai envoyé un message à ceux qui étaient contre moiElle l’a également déclaré aux médias, après avoir retenu ses larmes alors qu’elle montait sur le podium. « J’ai été attaqué et j’ai mené une campagne acharnée et c’est la meilleure réponse que je puisse donner. La réponse a toujours été sur le ring. »
Campagne de haine et de désinformation
Car trois ans après sa présence aux Jeux de Tokyo, où sa participation n’avait suscité aucune polémique, Imane Khelif s’est retrouvée à Paris, malgré elle, au centre d’une polémique sur le genre, menée par les milieux conservateurs, sur fond de désaccord entre le Comité international olympique (CIO) et la Fédération internationale de boxe (IBA).
La polémique découle de son exclusion des championnats du monde organisés à New Delhi en mars 2023 au motif, selon l’IBA, qu’Imane Khelif avait échoué à un test destiné à établir son sexe.
Lors d’une conférence de presse organisée à Paris par l’IBA – organisme non reconnu par le monde olympique – l’ancien chef de sa commission médicale, Ioannis Filippatos, a déclaré que des analyses sanguines effectuées sur le boxeur en 2022 avaient révélé « anomalies », ainsi que le Taïwanais Lin Yu-ting, qui disputera samedi la finale olympique dans la catégorie des moins de 57 kg. Les deux boxeurs, testés à nouveau un an plus tard, avaient présenté des résultats qui montrent qu’ils sont capables de se battre pour la victoire. “sont des hommes”a déclaré M. Filippatos. « Le problème est que nous avons deux analyses sanguines avec des caryotypes masculins. C’est la réponse du laboratoire. »il a expliqué.
Cette affirmation a été fermement démentie par le Comité olympique algérien, qui a rejeté dans un communiqué « allégations sans fondement ». « Le contenu et l’organisation de cette conférence de presse disent tout ce que vous devez savoir sur cette organisation et sa crédibilité »le CIO a réagi de son côté, accusant l’IBA d’avoir décidé “arbitrairement” l’exclusion des deux boxeurs à New Delhi.
Pour le CIO, l’éligibilité d’Imane Khelif ne fait aucun doute : elle peut participer au tournoi féminin des JO. Mais l’exclusion de New Delhi a refait surface lorsque son adversaire du premier tour, l’Italienne Angela Carini, a abandonné après moins d’une minute de combat, suite à un coup direct qui a fait perdre la tête à la jeune femme. “ça fait trop mal”Sur les réseaux sociaux, la boxeuse algérienne a ensuite été victime d’une campagne de haine et de désinformation, la présentant comme une « Un homme qui combat une femme ».
« Je suis une femme comme les autres »
L’Irlandaise Amy Broadhurst, qui l’a battue en 2022, lui avait apporté son soutien sur la plateforme X : « Je ne pense pas qu’elle ait fait quoi que ce soit pour tricher. Elle est née comme ça et ce n’est pas quelque chose qu’elle peut contrôler. Le fait qu’elle ait été battue par neuf boxeuses en dit long. ». Avant de demander« Arrêtez le harcèlement » par Khelif. Angela Carini se dit “attristée” par la controverse et ” Désolé “ pour son adversaire.
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A l’annonce de sa victoire finale vendredi soir, Imane Khelif a sauté de joie avant de saluer son adversaire et d’être portée en triomphe par son entraîneur dans une arène en liesse.
Son entrée sur le célèbre court Philippe-Chatrier, plus habitué à accueillir des matchs de tennis, avait déjà été acclamée par un vacarme retentissant. « Juste, juste » ponctué les trois rounds du combat, durant lesquels l’Algérien est apparu plus détendu et vif.
« Je suis pleinement éligible pour participer, je suis une femme comme les autres. Je suis née femme, j’ai vécu en tant que femme et j’ai concouru en tant que femme »elle l’a rappelé aux médias. Ses détracteurs « sont les ennemis du succès »elle a ajouté.
Une héroïne dans son pays
Les attaques qu’elle a subies et sa victoire ont fait d’Imane Khelif une héroïne dans son pays. Issue d’une famille modeste de la région semi-désertique de Tiaret, elle explique avoir dû se battre pour que sa famille, notamment son père, accepte sa boxe. Mais il est depuis devenu l’un de ses plus grands fans. A un correspondant de l’Agence France-Presse, ce soudeur au chômage de 49 ans confie sa fierté pour sa fille, “un exemple de femme algérienne, une des héroïnes de l’Algérie”.
“Nous sommes tous fiers de toi, championne olympique Imane, ta victoire d’aujourd’hui est la victoire de l’Algérie et ton or est l’or de l’Algérie… Merci #Imane_Khelif #Vive l’Algérie”publié sur X, le président algérien Abdelmadjid Tebboune, qui brigue un second mandat lors de l’élection présidentielle du 7 septembre.
La liesse a également gagné Alger, où une marée humaine a envahi le centre-ville, célébrant la victoire du boxeur par des feux d’artifice et un concert de klaxons.