Une blessure aux victimes de violences sexuelles, qui entraîne de nombreux problèmes de santé, est souvent invisible pour les professionnels de la santé. “Il s’agit de la contraction des muscles du plancher pelvien”, spécifie la physiothérapeute Caroline Arbor, qui pratique dans la réhabilitation périnéale et pelvienne (REPP). Mais cette approche, que l’ordre professionnel de la physiothérapie du Québec juge “crucial pour la qualité de vie de nombreuses personnes”, dont les victimes d’agression sexuelle, ne sont généralement pas proposées dans le réseau de santé publique. Actuellement, seuls les traitements pour prévenir ou traiter l’incontinence urinaire sont offerts gratuitement.
Caroline Arbor, qui fait de l’exercice dans une armoire privée à Montréal, est l’un des 707 physiothérapeutes spécialisés dans REPP au Québec, une branche de physiothérapie centrée sur des dysfonctionnements autour du plancher pelvien, enseigné au baccalauréat et aux microprograns de l’Université du deuxième cycle.
Également appelée périnée et située à l’intérieur du bassin, le plancher pelvien est souvent comparé à un petit bol ou à un hamac et soutient plusieurs nerfs et vaisseaux sanguins vitaux. Lorsque la respiration est compromise (par stress ou anxiété, par exemple), le plancher pelvien est comprimé – et comprime tout ce qu’il contient. Plus cette compression dure dans le temps, moins son contenu fonctionnera adéquatement, donc les complications peuvent s’ensuivre. La douleur ressentie pendant les relations sexuelles, dans le dos, dans les hanches, l’apparition de troubles tels que la constipation, l’alouette. En fin de compte, plusieurs des systèmes régissant le corps (digestif, urinaire, endocrinien, etc.) peuvent également être affectés.
Sur la base des techniques de relaxation, le REPP permet de résoudre les tensions, de mobiliser les articulations ou les nerfs et propose des exercices pour renforcer ou adoucir les muscles du plancher pelvien. Physiothérapeute Caroline Arboour voit dans les mères futures ou nouvelles, des personnes aux prises avec une douleur pelvienne résultant d’un trouble neurologique, et d’autres qui éprouvent Douleurs gynécologiques extrêmes quotidiennes, générées entre autres par endométriose. Elle rencontre également de plus en plus de victimes d’agressions – qu’elles soient physiques ou non.
Cette «physiothérapie de l’intime», en particulier avec les personnes qui ont subi une violence sexuelle, doivent être plus reconnues et accessibles, proclame Mélanie Morin, professeur à la Faculté de médecine et de sciences de la santé à l’Université de Sherbrooke. Ses avantages commencent à être perçus dans la clinique, assure-t-elle, mais ne restent pas documentés par des études sérieuses.
La recherche scientifique liée à ce qui est des reproductions très récentes, s’est jusqu’à présent concentrée sur l’incontinence ou le prolapsus (“descente d’organe”). L’Institut national d’excellence en matière de santé et de services sociaux (INESS), qui a le mandat d’évaluer les protocoles de prévention ou de traitement au nom du ministère de la Santé, a penché en 2022 et 2023 sur l’idée d’inclure REPP dans les services de santé couverts par le Schéma public. S’il recommandait l’accès pour prévenir et traiter l’incontinence urinaire et le prolapsus des organes pelviens, il ne voulait pas prendre position pour la douleur périnéale ou anorectale chez les femmes adultes, en jugeant les données actuelles insuffisantes.
“De nombreuses femmes n’ont pas le budget ou l’accès nécessaire à l’assurance”, se souvient Caroline Arbor. Il est temps, dit-elle, que nous promettons collectivement le REPP.